Montréal, 6 juillet 2002  /  No 106  
 
<< page précédente 
  
  
 
 
Stefan Metzeler est informaticien indépendant (www.amadeus-3.com). Il habite près de Lausanne en Suisse et est co-fondateur de l'organisation libérale Pro Libertate.
 
OPINION
 
ARGUMENTATIONS POUR LA LIBERTÉ
 
dialogue entre Stefan Metzeler et Turion Lugol
  
 
          Ce dialogue en questions-réponses a été extrait de messages parus sur les forums libertariens(1). Stefan Metzeler répond à un nouveau membre, Turion Lugol qui est étudiant. 
  
J'ai découvert les idées libertariennes il y a quelque temps, et j'en partage bon nombre. Toutefois, j'ai des doutes sur certaines questions, ou alors parfois j'ai mon idée mais je manque d'argumentation théorique, alors peut-être pourriez-vous m'aider? 
  
1. Quelles est votre position sur l'Union européenne, l'ONU, l'OTAN? Il me semble que d'après les idées libertariennes de base, vous devriez être contre (tout comme moi!). Pourtant, j'ai cru comprendre que vous étiez membre du Parti libéral vaudois (en Suisse), lequel, il me semble, est favorable à ces trois instances?  
 
Vous avez raison, nous sommes totalement opposés à toutes ces organisations et nous les combattons. Personnellement, je ne suis d'ailleurs membre d'aucun parti établi. M. Kohring(2), par contre, est effectivement membre du Parti libéral, mais précisément pour apporter une vision authentiquement libérale, en contradiction avec de nombreuses positions officielles du parti. Celui-ci a l'avantage d'attirer des gens qui ont au moins une prédisposition favorable à quelques-unes de nos idées.  
 
Qui doit s'occuper des « pauvres »? 
  
2. En cas d'absence d'État, qui s'occuperait des pauvres? Ou bien doit-on supposer simplement que la prospérité et le bien-être seraient tels qu'il n'y en aurait pas? Ou bien faut-il faire confiance à la charité individuelle?  
  
Votre question implique que l'État s'occupe des pauvres. Malheureusement, c'est surtout lui qui les crée. Mais étant donné la nature de notre univers, la misère et la pauvreté sont l'état naturel de tout être humain. Le miracle qu'il s'agit d'expliquer, c'est la prospérité.  
  
Avant de débattre de la « distribution » des richesses et de la prise en charge des pauvres, il s'agit donc d'examiner les mécanismes qui créent la richesse. Il est à présent prouvé que la liberté est l'une des composantes essentielles et indispensables. Plus l'État se mêle de l'économie et plus il détruit de la richesse ou l'empêche de naître.  
  
Admettons qu'une société libérale génère de grandes richesses et qu'il y ait toujours des gens pauvres – que ce soit en termes absolus ou relatifs. Ce qui est réaliste si on considère les handicapés et les malchanceux, les paresseux, ceux qui choisissent librement de ne travailler qu'un strict minimum et finalement tous ceux dont les capacités sont trop faibles pour obtenir un travail bien rémunéré.  
  
Mais il est certain que leur nombre sera bien plus faible dans une société libérale, tout comme le nombre de pauvres en Suisse n'est qu'une fraction des pauvres en France ou dans un pays d'Afrique ou d'Asie. Ce qui s'explique facilement quand on sait que la Suisse est encore et toujours l'un des pays les plus libéraux de la planète. En considérant les arguments des anti-libéraux de France, on ne peut que regretter qu'ils soient incapables d'observer leur pays voisin qui, selon leurs déclarations, devrait être un véritable enfer du libéralisme sauvage.  
  
Pour comprendre ce qui arriverait aux pauvres dans une société libérale, il faut étudier l'histoire ainsi que les différents systèmes actuels de prise en charge. On constate que par le passé, quand l'État ne prétendait pas s'occuper des pauvres, la solidarité spontanée et la charité volontaire était d'autant plus active. Je vous recommande le livre Tethered Citizens: Time to repeal the welfare state de Sheldon Richman (Future of Freedom Foundation) qui explore ce sujet.  
  
Et n'oublions pas le point le plus important: les personnes les plus faibles sont celles qui profitent le plus, proportionnellement, d'une société libérale. Le bénéfice est tout simplement incommensurable! Imaginez donc qu'une personne handicapée, qui ne vivrait même pas 5 minutes par ses propres moyens dans un monde sauvage, peut bouger grâce à des prothèses ou des chaises roulantes, peut « lire » grâce à des ordinateurs avec synthèse vocale, peut même espérer être complètement guéri grâce aux progrès de la science, qui dépend de la liberté individuelle plus que n'importe quoi d'autre.  
  
Tous ces avantages ne sont possibles que grâce à la division du travail, qui libère des gens pour faire de la recherche. Plus les gens sont libres et plus il y a de ressources dans la société. Plus il y a de moyens et plus les faibles peuvent bénéficier du travail des gens les plus forts de la société. Ainsi un ouvrier peut profiter du travail de tous les génies qui ont tout inventé, du feu jusqu'au moteur à combustion.  
  
L'État et la police  
  
3. Comment assurer la sécurité sans État? Si des bandes de criminels se forment, il faudrait créer des milices ou collectifs de défense pour s'en protéger, mais comment éviter ensuite que ces milices ne deviennent des mini-États? Plus généralement, si au sein d'une société anarchiste un État se crée, comment l'empêcher de tout engloutir?  
  
Un État libéral ne va pas naître instantanément, pas plus que la Suisse moderne n'est apparue spontanément, d'un jour à l'autre. Une solution libérale ne réussira à s'établir que parce qu'elle satisfait une demande. Puisque le propre du libéralisme est de libérer les énergies créatives, je ne peux pas vous donner LA recette qui va effectivement s'imposer. Il y en aura très certainement plusieurs et de plus, de nouvelles solutions pourront apparaître et disparaître, selon le principe qui veut que le mieux est l'ennemi du bien.  
  
Pour vous donner quelques débuts de réflexion, il se pourrait qu'on permette dans un premier temps aux agences établies, c'est-à-dire aux polices et justices d'État, de se faire la concurrence comme pour les compagnies de télécommunication. Vous pourriez ainsi faire appel à la Police allemande à Paris ou au FBI à Genève. Ces polices créeront alors des filiales qui seront gérées comme la maison mère, avec certaines particularités dans les méthodes, le style, l'organisation et finalement le prix. De plus, puisque les polices seront en compétition, elles devront commencer à faire des calculs investissement-bénéfice comme toute autre entreprise, ce qui les amènera à être plus efficaces pour un moindre coût et de plus à répondre réellement à la demande des clients, plutôt qu'à des impératifs politiques.  
  
La « chasse aux sorcières », les agents racistes, la lutte anti-drogues, etc., seraient alors totalement abandonnés, puisque non rentables si on ne peut pas faire payer les autres pour ses propres bigoteries. Un autre modèle impliquerait que des sociétés d'assurance proposeraient un service de sécurité lié à la police d'assurance. Soit elle vous protège, soit elle paye, ce qui créerait une forte incitation à fournir un bon service de protection.  
  
Aucune de ces solutions ne permettrait à une telle police de « prendre le pouvoir », surtout parce qu'elles seraient toutes en concurrence, mais toujours dans le cadre du principe de la non-agression. Les résolutions de conflits entre polices et systèmes de justice se passeraient sous forme de négociations et d'arbitrages. La guerre est la forme la plus coûteuse de résolution des conflits. Personne ne l'utilisera s'il ne peut pas imposer le coût à autrui. Et n'oublions pas que chaque citoyen aurait le droit de posséder et porter des armes, ce qui réduirait significativement le risque d'une prise de pouvoir.  
  
Sachant que les pires crimes au 20ième siècle furent l'oeuvre de gouvernements, les quelques crimes et incidents qui surviennent forcément dans toute société, armée ou non, sont totalement négligeables. Le plus important, c'est d'empêcher les conflits collectivistes, qui opposent des factions politiques ou une classe dirigeante à des classes de victimes (juifs, bourgeois, noirs, blancs...).  
  
Microsoft et la concurrence 
  
4. Dans un système libéral, comment éviter que toutes les entreprises fusionnent? Car dans ce cas, cette entreprise deviendrait une sorte d'État, qui pourrait éviter toute concurrence en faisant des économies d'échelle et en profitant d'une supériorité technologique initiale... Prenons un exemple très concret: l'Ayn Rand Institute qui prend la défense de Microsoft dans le procès que le gouvernement américain lui intente. En tant qu'informaticien, vous connaissez sans doute la situation de monopole de Microsoft. Est-ce vraiment souhaitable? Tous leurs abus: concurrence déloyale, abus du monopole, tentative d'empêcher des produits concurrents de fonctionner...  
  
Je connais extrêmement bien Microsoft, puisque j'ai commencé à programmer quand Bill Gates avait tout juste crée son premier Basic. À une époque, quand j'étais encore jeune, naïf et la tête pleine de bêtises, je n'arrêtais pas de fulminer contre IBM, ma bête noire, puis contre Microsoft ou plutôt contre tous ces gens stupides qui achetaient les produits Microsoft. À force d'essayer de convaincre ces utilisateurs de changer (par exemple pour OS/2), je me suis rendu compte qu'ils avaient tous agi sur la base d'arguments parfaitement valables, du moins en considérant leurs propres contraintes et que le choix des produits Microsoft était bien volontaire et correspondait à la meilleure solution dans leur cas.  
  
Par contre, j'ai également rencontré des tas de gens qui ont fait des choix différents – dont moi – et que rien n'avait empêché d'agir ainsi. Microsoft ne leur envoyait pas de menaces ni d'hommes armés pour les ramener sur le « droit chemin ». Un choix non majoritaire comporte des coûts, mais aussi des avantages.  
  
OS/2 est d'ailleurs plus que significatif: au moment du lancement de Windows, IBM pesait en tout cas 20 fois plus que Microsoft. Ils étaient en compétition directe. IBM était établi et avait tous les moyens dont Microsoft dispose maintenant contre ses concurrents. Pourtant IBM a lamentablement échoué avec un meilleur produit! Ce n'est pas Microsoft qui en a décidé ainsi, ce sont les millions d'utilisateurs.  
  
Mais qu'en est-il de l'importance réelle de Microsoft dans le marché mondial et du risque de domination? Eh bien tout cela est minime. Bill Gates lui-même avoue qu'il travaille comme un fou, parce qu'il sait qu'il pourrait se faire dépasser d'un jour à l'autre par une entreprise qui n'existe peut-être même pas encore. Microsoft est totalement dépendante du choix de ses clients. Si un jour ceux-ci décident de ne plus suivre Microsoft, la chute sera rapide et terrible. Et sans intervention étatique, fatale en très peu de temps. 
  
IBM, à ce stade, avait dû dégraisser de 400 000 à 250 000 emplois. Ce qui n'a pas empêché le redémarrage de l'économie américaine, tout au contraire. C'est la preuve que passée la taille optimale, une entreprise devient non rentable.  
  
     « Un État libéral ne va pas naître instantanément, pas plus que la Suisse moderne n'est apparue spontanément, d'un jour à l'autre. Une solution libérale ne réussira à s'établir que parce qu'elle satisfait une demande. »
 
Le pouvoir de Microsoft est donc quasiment non-existant. En fait, Microsoft ne peut exercer du pouvoir qu'à travers la séduction, qu'il s'agisse de la vente de ses produits face à la concurrence, de l'engagement d'employés de concurrents, ou du rachat d'autres entreprises. Rien ne peut obliger un client à acheter, un concurrent à vendre, même pas une offre mirobolante. Sauf grâce à l'intervention de l'État, tout monopole est toujours conditionnel.  
  
Est-ce qu'une seule entreprise pourrait effectivement fusionner au point de devenir un conglomérat gigantesque? Uniquement en abandonnant les principes libéraux et en devenant effectivement une machine répressive, mafieuse, et en se servant de la violence. Sinon c'est impossible pour la simple raison qu'une entreprise devient de moins en moins compétitive en augmentant sa taille. À quelques rares exceptions près, les fusions importantes ont été des flops fracassants. Leur seule raison d'être était d'enrichir le management au détriment des actionnaires, qui sont souvent assez naïfs pour croire les promesses des prétendues économies d'échelle. 
  
Pour toute activité économique, il y a une taille critique à partir de laquelle on perd plus par la lourdeur administrative que ce qu'on gagne en économie d'échelle. La fusion de compagnies qui ne sont pas dans le même domaine tient donc plus de la roulette russe que de la bonne gestion.  
  
Si on peut comprendre facilement l'attrait du pouvoir à présider une énorme compagnie de 500 000 employés pour le directeur, c'est beaucoup moins évident au niveau de l'actionnaire. Ce qui compte pour lui, c'est le gain en pourcentage du capital investi. Il s'en fout finalement du prestige. Il ferait donc bien de limiter les folies de grandeurs de la direction, pour leur rappeler que leur job consiste à rentabiliser l'investissement. C'est drôle que les adversaires des capitalistes ne cessent de prétendre que ceux-ci sont purement intéressés par le profit, mais les accusent la seconde d'après de toutes sortes de motivations non profitables. 
  
Et finalement, demandez simplement à toute personne qui pose ce type de questions combien de fois une entreprise comme IBM, Nestlé ou Microsoft a affecté ses propres décisions de vie. Dans le meilleur des cas, il aurait pu être affecté en étant employé d'une telle entreprise ou alors en tant que client, à travers de bons ou mauvais produits. SAUF, encore une fois, si une telle entreprise agit en bénéficiant de l'aide de l'État.  
  
Le système de santé 
  
5. Dans le débat sur la génétique, il me semble que vous avez mentionné à un moment l'absurdité d'une sourde qui voulait avoir des enfants sourds. Dans un système libéral, personne ne l'en empêcherait je présume? Simple curiosité, mais cela soulève le problème des rapports parents/enfants...  
  
Dans le système actuel, personne ne l'en empêche!  
  
Dans un système libéral, l'enfant pourrait porter plainte pour dommage intentionnel quand il en sera capable. Et en fait même une autre personne, qui serait au courant de la chose (médecin, infirmière, connaissance...) pourrait chercher à l'empêcher, puisqu'un tel acte représenterait une agression directe contre l'enfant à naître. Le fait de savoir cela retiendrait beaucoup de gens de commettre de tels actes.  
  
Mais bon, « shit happens ». La pire hypocrisie des étatistes, c'est de prétendre que de tels problèmes seraient l'apanage d'une société libérale, quand, en fait, ils sont l'apanage de la bêtise humaine.  
  
6. Pour les assurances maladie, j'ai tenté de convaincre un prof (oui ce sont tous des marxistes, c'est vraiment désespérant) de la nécessité de la libre concurrence entre les caisses pour minimiser les coûts, j'ai expliqué l'évidence des abus liés aux subventions étatiques: corruption, traitements inutiles et autres. Bien-sûr, il m'a rétorqué l'argument bidon que vous mentionniez déjà, comme quoi « la santé c'est pas un bien de marché comme des petits pois »... Par contre, il m'a fait remarquer qu'au moins tout le monde a accès aux soins. Serait-ce le cas dans un système libéral? Bien-sûr, il faut noter que dans de nombreux systèmes de santé étatiques, l'État économise et donc l'accès aux soins est bien moindre (et plus cher, corruption oblige!) que dans les systèmes privés. Certes, on peut dire que tout le monde a effectivement accès aux soins, mais à quel prix! Dans un système libéral, toute caisse serait-elle obligée de traiter avec tous les patients et tous les médecins ou non?  
  
Non, bien entendu toute caisse, tout médecin, tout patient serait parfaitement libre de choisir avec qui ils traitent, au plus grand bonheur de tous les participants. Vous aviez tout à fait raison avec vos arguments: l'intervention étatique réduit la qualité et la quantité des soins disponibles, en augmente les coûts et la fausse « gratuité » génère une surconsommation comme dans n'importe quel autre domaine. Imaginez deux secondes que l'accès aux cinémas soit subventionné au point qu'on ne payerait que 10% du coût réel. Quelle serait, à n'importe quel moment, la probabilité de trouver une place dans un cinéma? Et comment pourrait-on différencier entre quelqu'un qui aime vraiment tel ou tel film et quelqu'un qui veut juste s'abriter de la pluie et qui trouve que le cinéma subventionné est moins cher que le café?  
  
Le même raisonnement s'applique au marché de la médecine. Le plus pitoyable, c'est que la Suisse passe par toutes les phases qu'on a déjà observées en Angleterre et en Allemagne, pays qui ont juste quelques années d'avance dans la socialisation des soins. En Angleterre, on peut considérer que c'est le système proche du terme du développement: complètement à bout. Pour certaines interventions, même importantes, il y a des listes d'attente de 2 ans!  
  
En Suisse, on a commencé à rationner les soins, à prescrire avec un soin extrême (quelle perte de temps) quels soins sont remboursés d'office ou non, ce qui implique une ingérence majeure dans le travail du médecin. À présent, on limite la liberté des médecins d'ouvrir un cabinet privé, ce qui fait baisser leur revenu et gaspille leur talent. L'État, en quelques années, a réussi à instaurer la guerre de tous contre tous – assurances, médecins, hôpitaux, patients, gouvernement fédéral et gouvernements cantonaux (en Suisse).  
  
Quand on pense au fait qu'un marché génère l'harmonie en assurant la coïncidence de l'offre et de la demande à travers un mécanisme tout simple: les prix!  
  
Un vieux médecin américain disait qu'à l'époque qui précède les assurances maladie, autour de 1910, il soignait les malades en échange de ce qu'ils étaient capables de payer. Dans certains cas, ça se limitait à quelques oeufs frais et du lard. De toute façon, il n'avait pas le choix. C'était ça ou changer de métier. À partir du moment où les assurances s'étaient installées, les médecins demandaient de plus en plus d'argent et l'intervention de l'État leur permettait enfin d'évincer la concurrence indésirable (les soigneurs sortant de la « médecine d'école », même pour des procédures anodines, comme l'accouchement par les sage-femmes et le plâtrage d'une jambe cassée).  
  
Réchauffement planétaire? 
  
7. Vous dites qu'il n'y a pas d'influence humaine sur le réchauffement planétaire, mais il me semble qu'on ne peut pas vraiment nier certains désastres écologiques (marées noires par exemple, pollution des rivières...), de plus il me semble que le pétrole est épuisable et nécessaire à la fabrication de plastique, médicaments... Comment empêcher sans intervention de l'État que la ressource pétrole soit épuisée? Les solutions existent, telles que les voitures électriques, ne pensez-vous pas que si l'État les subventionnait massivement elles se vendraient comme des petits pains? Autre exemple, la libéralisation prévue du marché de l'électricité... N'y a-t-il pas un risque que la Suisse préfère acheter de l'électricité bon marché à l'étranger plutôt que l'électricité suisse produite dans les centrales hydroélectriques?  
  
Même si l'humanité avait une influence sur le climat, ce qui serait au moins pensable, cet effet devrait être associé à un phénomène naturel et traité de la même manière. Personne ne pourrait réellement prévoir un tel effet, ni préconiser une solution efficace. Toute tentative de « résoudre » un tel problème risque de s'avérer être pire que le problème.  
  
De toute manière, n'importe quelle intervention étatique se résumera à prélever beaucoup d'argent, dont l'essentiel disparaîtra dans les méandres des administrations publiques, dans les poches des politiciens, des fonctionnaires hauts placés, des mafieux et des dirigeants d'entreprises proches du pouvoir. Il me semble aberrant que quelqu'un de raisonnable puisse imaginer que les gouvernements de la planète peuvent agir de manière honnête et efficace pour résoudre un tel problème. Sachant qu'en Corée du Nord, le gouvernement n'arrive même pas à nourrir sa population, que tous les gouvernements de la planète n'arrivent pas à contrôler le marché de la drogue, que l'Angleterre et la France sont incapables de contrôler le flux de réfugiés à travers un seul point d'accès...  
  
Toute « solution » qui consisterait simplement à limiter les émissions supposées à la source du problème créerait la misère et l'effondrement de toute l'économie planétaire. Il est bien clair que si nous sommes tous morts, nous n'influencerons plus le climat. Si on traite un problème environnemental comme n'importe quel autre problème, alors des sociétés privées vont trouver des solutions innovatrices. Concernant le simple CO2, par exemple, une entreprise a proposé une poudre dérivée de chaux vive, qui absorbe autant de CO2 qu'une voiture en produit en brûlant 5 litres d'essence pour un prix beaucoup plus faible que les taxes prévues... taxes qui empêcheront évidemment d'utiliser les ressources disponibles de la manière la plus efficace.  
  
Les pollutions habituelles, des déchets aux marées noires, sont et restent des problèmes locaux, terribles, parfois, mais certainement pas menaçant pour la vie sur terre. Mexico City est effectivement complètement polluée, mais 20km plus loin, ce n'est plus qu'un mauvais rêve. Pour l'essentiel, la terre est couverte de nature en bonne santé. Exemple: Le New Jersey est l'État le plus densément peuplé de l'ensemble des États-Unis. Les deux tiers du territoire sont couverts de forêts et de champs agricoles, seul un tiers est déclaré zone de résidence, ce qui inclut parcs, jardins, etc. On a juste l'impression qu'il y a beaucoup de monde sur terre parce qu'on se promène toujours là où il y a beaucoup de monde. En mettant chaque personne – bébés et vieillards compris – dans une maison de 100m2, la surface occupée par 6 milliards de ces maisons (beaucoup plus que nous n'avons réellement en moyenne) ne couvrirait même pas l'État du Texas. Le reste de la planète serait alors totalement dépourvue de présence humaine. La terre est immense.  
  
La totalité des déchets du 21ième siècle, en admettant une croissance constante, tiendraient dans un trou de 1km3. C'est énorme et c'est presque rien au niveau planétaire. C'est juste que – étalée en fine couche – elle recouvre une surface immense.  
  
C'est précisément pour cette raison que la probabilité qu'on « épuise » le pétrole est absurde. On n'a consommé que l'équivalent de 20% du lac Tahoe (Californie) en pétrole depuis 150 ans! Cela représente une minuscule cavité au niveau planétaire. On n'a même pas idée des réserves gigantesques qui peuvent dormir encore un peu partout.  
  
De toute façon, c'est sans importance. Les réserves connues suffisent pour 100 ans (!) et on ne cesse d'en découvrir de nouvelles. Par ailleurs, d'ici 25 ans, d'autres sources d'énergie se seront substituées au pétrole, probablement l'hydrogène, produite à partir d'énergie solaire dans les déserts du monde, ce qui, soit dit en passant, constituera une source de revenu pour les pays pauvres. Et cela avec une absence quasi-totale de pollution et entraînant un enrichissement massif de l'humanité.  
  
Ce type de discussion revient régulièrement. Autour de 1860, un député anglais avertissait ses collègues avec insistance que les réserves de charbon allaient bientôt être épuisées et que leurs descendants devraient vivre dans le froid et la misère. Selon les connaissances et avec la consommation actuelle, les réserves de charbon devraient encore suffire pour 3000 ans.  
  
Enfin, il ne faut surtout pas subventionner les voitures électriques, etc. Les solutions actuelles ne se vendent pas par manque d'argent, mais parce qu'elles ne sont pas encore au point, parce qu'elles sont inefficaces en termes de ressources consommées. Des solutions bien meilleures seront mises sur le marché naturellement, le temps venu. Les entreprises ayant lancé ces produits réaliseront alors de gros bénéfices, ce qui est normal, mais simplement en fonction de la richesse créée. Il est bien clair que le potentiel de gain pour celui qui apportera les bonnes réponses est immense, ce qui suffit actuellement déjà pour inciter beaucoup de monde à investir massivement.  
  
La distribution d'argent par l'État, par contre, empêcherait une recherche efficace et ciblée. Des subventions mèneraient à des dislocations économiques, à un mal investissement à grande échelle, réduisant la probabilité qu'une solution réelle et durable sera trouvée.  
  
Voilà, j'espère que mes questions ne sont pas trop naïves...  
  
Pas du tout. J'espère vous avoir donné des munitions pour votre combat.  
  
  
1. Le forum de prolibertate.org, le forum du Cercle Hayek, et le forum des libertariens>>
2. Un des animateurs de prolibertate.org et auteur de l'article Alain Madelin doit faire son coming out libéral au sujet des armes, le QL, no 104>>
  
   
Articles précédents de Stefan Metzeler
 
 
<< retour au sommaire
 PRÉSENT NUMÉRO