Montréal, 12 octobre 2002  /  No 111  
 
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Marc Grunert enseigne les sciences physiques dans un lycée de Strasbourg et anime le Cercle Hayek, consacré à la réflexion et à la diffusion du libéralisme. Il est également éditeur adjoint du QL pour la section européenne.
 
CHRONIQUE DE RÉSISTANCE
 
MONTRÉAL G02: UN LABORATOIRE
POUR UNE TYRANNIE
 
par Marc Grunert
  
 
          Les marxistes ne s'affichent plus comme tel, dogmatiquement, mais s'approprient les mots « démocratie », « droits de l'homme », « citoyenneté », pour véhiculer leurs idées. Aujourd'hui le socialisme avance masqué.  
  
          Alors que le capitalisme et le libre-échange s'imposent comme la pratique spontanée et naturelle des populations, en particulier celles qui ont le plus besoin d'améliorer leurs conditions, les intellos marxistoïdes et leurs hordes de militants, désireux d'imposer leur politique du brigandage et de l'impôt mondial, se réunissent, débattent, créent des laboratoires de « réflexion » payés par de l'argent public.
 
          La pompe rhétorique étant le premier signe annonciateur de la propagande socialiste insidieuse, comment ne pas décerner un prix d'excellence aux organisateurs de la Conférence G02 de Montréal sur la « gouvernance mondiale ». Tous, membres d'une sorte de fraternité socialiste informelle, d'un Komintern renaissant qui noyaute l'ONU (à moins que l'ONU ne soit elle-même ce Komintern), ces organisateurs ont fait preuvre d'une belle créativité en novlangue mondialiste: la conférence « Société civile et démocratisation de la gouvernance mondiale » aura donc lieu du 13 au 16 octobre à Montréal. Traduction: entre la liberté des individus et la politique « éclairée » des Führer de l'État mondial, il faut choisir. Et leur réponse? Lisez! C'est dans le texte. Même pas besoin de décodeur.   
  
La gouvernance mondiale: pourquoi? 
  
          Tel est le thème de la première conférence. Que veulent les socialistes de G02? D'abord contrôler « l'interdépendance des citoyens du monde » qui « ne cesse de s'accroître et d'envahir tous les domaines ». Mais qu'est-ce qu'implique ce contrôle? Rien d'autre que l'anéantissement du droit de disposer de ses biens, de les vendre et de les acheter à qui bon nous semble. La parenté avec la méthode communiste est évidente. Pour donner à cette tyrannie un goût moins amer, nommons-la « démocratie participative », leitmotiv du « congrès pour la suppression de la liberté ». 
  
          Nous savons quoi penser de cette sorte de démocratie: la majorité envieuse a le droit de voler légalement la minorité politiquement plus faible. « Imaginez, écrit Hans-Hermann Hoppe, un gouvernement mondial, démocratiquement élu à l'échelle mondiale en suivant le principe un homme-une-voix. Que serait le résultat probable d'une telle élection? Le plus vraisemblable est que nous aurions un gouvernement de coalition sino-indien. Et qu'est-ce que ce gouvernement serait le plus enclin à faire pour complaire à ses électeurs et se faire réélire? Il découvrirait probablement que l'Occident a beaucoup trop de richesses et que le reste du monde, particulièrement l'Inde et la Chine, bien trop peu, et par conséquent mettrait en oeuvre une redistribution systématique du revenu du riche Occident vers le pauvre Orient. Ou alors, imaginez qu'aux États-Unis on étende le droit de vote aux enfants de sept ans. Le gouvernement ne serait peut-être pas composé d'enfants, mais ses politiques, selon toute probabilité, refléteraient le "souci légitime" des enfants de disposer d'un accès "suffisant" voire "égal" à des hamburgers, des limonades et des vidéocassettes "gratuits"(1). » 
  
          Mais ce ne sont pas que les « riches » qui doivent redouter la « démocratie participative ». Hoppe a clairement décrit la logique de la démocratie. L'adjectif « participative » n'est qu' un leurre destiné à faire croire que tout le monde peut gouverner ou participer au gouvernement. La « citoyenneté » est un autre leurre de ce genre. Nous savons bien, en fait, que seuls quelques-uns peuvent gouverner au nom de tous. La raison est qu'il faut bien vivre, donc produire, travailler, gagner sa vie. Les socialistes mondialistes savent très bien qu'une spécialisation du travail est inévitable, que les « citoyens » délèguent leur pouvoir et leurs droits pour pouvoir nourrir leur famille. Car, voter, participer au pouvoir, tout cela ne permet pas de gagner sa vie, sauf en volant l'argent des autres légalement. La « démocratie participative » sera inéluctablement la tyrannie d'une classe, celle des politiciens improductifs. 
  
          J'entends déjà la complainte des pleurnichards tiers-mondistes, avec leur rapport Nord-Sud comme seule boussole idéologique. Mais il serait temps de comprendre, et les gens du Sud le savent, que seul le capitalisme non entravé peut les sortir de l'ornière de la pauvreté. Deux études parues sur le site du cyber-institut d'Henri Lepage le démontrent bien(2). 
  
L'ONU dénaturée et noyautée 
  
          Hommes libres, craignez pour votre liberté! Les institutions étatiques inventées pour la garantir trahissent leur mission. La méthode du cheval de Troie est employée à grande échelle. L'ONU est contrôlée par l'internationale socialiste. Comme bien d'autres institutions internationales, les Nations Unies sont vampirisées par les révolutionnaires d'extrême-gauche(3). Cette réalité découle de la stricte application de la doctrine de Gramsci qui a théorisé la prise du pouvoir culturel par les intellectuels en noyautant toutes les institutions. 
  
          L'ONU n'est plus l'ONU mais un instrument de la révolution pour les communistes. Que penser en effet de la question insidieuse posée par Mario Lavoie, membre du Forum international de Montréal et coordonnateur du volet « Pour les Nations unies, plus de démocratie [...] plus de pouvoir »: « Peut-on pressentir de nouvelles formes de gouvernance à la suite des conférences de l'ONU tenues à Durban, à Monterrey ou à Johannesburg? » Telle est une des questions censées faire l'objet d'un « débat » lors de la conférence. Mais poser cette question, c'est y répondre: l'ONU doit se transformer pour devenir non pas un organe de protection de la paix, mais un instrument de redistribution économique et de planification, un moyen de faire advenir le socialisme mondial. 
  
     « L'ONU est contrôlée par l'internationale socialiste. Comme bien d'autres institutions internationales, les Nations Unies sont vampirisées par les révolutionnaires d'extrême-gauche. »
 
          Autre question inquiétante qui sera débattue: « Le système démocratique de gouvernance mondial doit-il choisir l'ONU comme organe suprême? » Quand je lis ça, une association de pensée se produit comme un réflexe d'auto-défense: organe suprême = soviet suprême. Quant à la prétendue démocratie, comment ne pas se souvenir que les régimes marxistes s'auto-proclamaient « démocraties populaires »? Ainsi tous les ingrédients sont là: une minorité d'activistes tapageurs gangrènent les institutions et les médias, répètent à l'envi que le monde est injuste, que le pauvre Sud est victime du Nord qui s'enrichit au détriment d'une classe (celle des nations pauvres) et grâce à cette exploitation. 
  
          Établissons la démocratie mondiale, ruinons les riches pour aider les pauvres à se développer et instaurons le partage universel administré par un Soviet suprême, un pouvoir suprême qui représentera les opprimés, du moins leurs intérêts, c'est-à-dire leurs intérêts tels que le Soviet suprême les a définis. Non monsieur Lavoie! Ne nous resservez pas ce plat avarié, on a déjà consommé. Malheureusement le négationnisme qui sévit empêche encore l'opinion publique de prendre pleinement conscience des crimes du communisme, de son fonctionnement intellectuel et politique. Le procès du communisme n'a pas encore eu lieu et on peut donc saluer la parution du livre de Stéphane Courtois, Du passé faisons table rase, Histoire et mémoire du communisme en Europe (Robert Laffont, octobre 2002), faisant suite au « livre noir du communisme ». 
    
          Et la francophonie dans tout ça? Eh oui! La question est posée. « La société civile de la Francophonie (sic) peut-elle imposer ses vues, ses valeurs, sa culture et ses institutions dans la construction d'une gouvernance mondiale? Comment peut-elle éviter qu'une telle gouvernance soit dessinée à l'image des économies et des cultures dominantes, oubliant ainsi les valeurs de la société civile francophone? » (Jean St-Denis, Centrale des syndicats du Québec). Un syndicaliste! Mais comment ne l'a-t-on pas deviné? Non mais qu'est-ce qu'il veut celui-ci? Créer un nouveau statut de patrimoine mondial de l'humanité, d'une nouvelle espèce protégée? Il faudrait qu'il comprenne qu'on n'empêche personne de s'isoler du monde parce qu'il refuse de parler la langue que les autres parlent, ni de se réunir avec des amis pour parler le volapük. Une langue n'a aucun droit. Et si personne ne veut parler le volapük ce serait vraiment un acte de pure dictature que de forcer les autres à le faire. 
  
          Ce que ces marxistes nous préparent dans leur chaudron onusien c'est un marchandage planétaire des « droits à » dont l'issue prévisible n'est pas autre chose que des conflits perpétuels, une guérilla sociale dont ils sont déjà les meneurs bien rémunérés. Le conflit social, ils en vivent; pas étonnant qu'ils l'instituent. Rappelons que le Droit doit, pour être cohérent et applicable, rester compatible avec un principe absolu: la non-agression. Non-agression de la personne, non-agression de la propriété légitime. Tout le monde peut observer ce principe universel car il est non contradictoire. Or ce n'est pas le cas des faux droits que veulent instaurer les communistes onusiens. Leurs « droits » ne sont que des faveurs accordées aux uns en agressant la propriété des autres. Un marchandage réglé et institué par la force. 
  
Vers un parlement mondial 
  
          À force de répéter une idée, et en commençant doucement, on finit par la rendre évidente. Surtout quand on n'en mesure pas encore les conséquences et qu'on pense qu'elle est dans la continuité de ce qu'on connaît déjà. Or nous connaissons la démocratie, lieu commun de la pensée politique. « La démocratie c'est bien, plus de démocratie c'est mieux », voilà l'axiome de notre temps où les idéologies avancent masquées. Donc, si la démocratie c'est bien, pourquoi ne pas l'étendre à l'infini. Pourquoi ne pas instaurer la démocratie mondiale? Hoppe a déjà répondu (voir le texte donné en référence). Si la démocratie est concevable à petite échelle, elle deviendra, à l'échelle planétaire, la dictature de la majorité et/ou de la minorité des hommes de l'État mondial. 
  
          Voilà exactement ce que recherchent les communistes qui noyautent l'ONU. J'appelle communistes ceux qui visent à mettre les hommes et leurs activités non criminelles sous le contrôle d'un État censé incarner l'intérêt des « prolétaires », des « pauvres », des « francophones », bref toutes les minorités dont ces mêmes communistes ont décidé qu'elles étaient opprimées par le capitalisme. En réalité, comme l'histoire l'a démontré, un tel État serait plus criminel, plus oppresseur que n'importe quelle mafia car il n'y aurait plus aucun moyen de lui échapper. 
  
          Or le président de l'Assemblée national du Québec, Jean-Pierre Charbonneau, pose quelques jalons supplémentaires pour habituer l'opinion publique à l'avènement « inéluctable » (la loi historique marxiste) d'un parlement mondial. On discutera de « la valeur du système parlementaire dans l'optique de la gouvernance mondiale », du « rôle transnational des parlements ». Les hommes de l'État de tous les pays ont bien évidemment intérêt à protéger leur pouvoir en créant un cartel politique et c'est exactement ce qu'ils font. Ainsi, en créant une machinerie politique planétaire ils pourront continuer à faire carrière tranquillement, à transmettre leur pouvoir et le perpétuer en créant eux-mêmes les problèmes qui donneront du travail à leurs successeurs. 
  
          D'après les organisateurs « les droits humains sont de plus en plus exposés à une multitude de dangers ». Mais nous connaissons leur conception des droits humains. Elle est fondée sur la destruction de la propriété privée, sur la violation du droit d'échanger librement. Ainsi « on débattra des mérites de l'imposition éventuelle d'une taxe sur les transactions financières ou d'autres nouvelles formes de contrôle ». Le programme de destruction économique est sur les rails. Ces gens n'ont donc rien appris des expériences socialistes passées. 
  
          Si le socialisme n'a pas marché à l'échelle d'un pays, essayons-le à l'échelle de la planète! C'est d'une logique implacable. Mais c'est vrai finalement. Lorsqu'un seul système sera imposé à toutes les nations par leurs classes politiques, il n'y aura plus de point de comparaison. Mais il restera toujours des Winston (Orwell, 1984) pour retrouver le fil qui conduit aux lois naturelles de la condition humaine. Une gouvernance mondiale est irréaliste, insupportable, comme toutes les tyrannies. La démocratie illimitée est désormais le nouveau principe de l'expansion du collectivisme. En l'absence de toute idéologie concurrente, la démocratie est d'ores et déjà le cheval de Troie du communisme et de l'étatisme, avec la complicité béate des démocrates sociaux qui nous gouvernent. Ce forum G02 de la « gouvernance mondiale » est un laboratoire pour une tyrannie. 
  
 
1. Hans-Hermann Hoppe, « À bas la démocratie » (traduction de François Guillaumat), Liberalia.com>>
2. Voir les articles « Comment sortir l'Afrique de la misère? », de Pierre Denis, et « Le vrai secret du capitalisme », de Hernando de Soto, sur le site de Euro92.org>>
3. Ce noyautage et cette perversion des institutions internationales par les communistes ont été amplement démontré par Pascal Bernardin dans son livre, L'empire écologique . Voir mon article, « Le Fascisme écologique et l'État mondial en devenir », dans le QL et celui de Pascal Bernardin, « La Face cachée du mondialisme vert », sur Euro92.org>>
  
 
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