Montréal, 12 avril 2003  /  No 123  
 
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François Morin est conseiller financier dans la région de Québec.
 
BILLET
 
LES ENFANTS APPARTIENNENT À L’ÉTAT
  
 par François Morin
  
  
   « Les enfants, ça n'appartient pas juste aux parents. C'est la viabilité d'une société que d'avoir des enfants. »
 
–Marie Leahey, directrice générale, Service d'intégration des femmes au travail
  
          Si cette citation vous laisse indifférent, ou plus encore, si vous la trouvez sensée, c’est que vous avez complètement capitulé devant la pensée étatiste en vogue au Québec. Le 1er avril dernier, l’émission Enjeux de la télévision d’État présentait un reportage au titre accrocheur et assurément social-démocrate: « Un troisième enfant, non merci ». Pendant 30 minutes, une panoplie de gens très intéressés à la question familiale ont déblatéré des propos plus inquiétants les uns que les autres. Tous les clichés habituels d’une société qui dilue chaque jour un peu plus les droits individuels y sont passés.
 
          Nos enfants propriété de l’État! pourquoi pas. La moitié de notre vie est dirigée par l’État. N’est-ce pas l’État qui nous prend en charge à la garderie, à l’école, au travail, à la retraite? On peut même appeler des fonctionnaires si on trouve ça trop difficile d’être parents, j’ai vu ça dans une pub télé. Sommes-nous seulement une minorité à s’inquiéter de cette incursion presque totale dans notre vie privée? Élever mes enfants est mon affaire, pas celle des fonctionnaires. Si je les laisse se fourrer le nez partout, c’est que je n’ai pas le choix, ils ont des lois et des policiers pour les faire appliquer. Ils ont mon argent pour se financer. Des propos tels ceux de Mme Leahey sont franchement inquiétants, surtout que cet intérêt pour nos enfants n’est pas désintéressé.  
 
   « S'il n'y a pas d'enfants pour payer leur pension, eh bien, ils n'auront pas de pension. [...] N'oublions pas que ce sont les enfants d'aujourd'hui qui feront les retraites de demain. S'il n'y a pas d'enfants aujourd'hui, une société n'a plus d'avenir. »
 
–Marie Leahey, directrice générale, Service d'intégration des femmes au travail
  
          Dans la pensée collectiviste du Québec et de la France (le reportage portait sur ces deux sociétés), tous doivent être solidaires. Aux yeux des collectivistes, faire payer des retraites dorées par des enfants à naître est tout à fait normal, une sorte de solidarité intéressée quoi. Nul besoin d’épargner, de prévoir, de dépenser avec parcimonie, notre progéniture sera esclave pour payer nos vieux jours. En plus d’être totalement irresponsable et immorale, cette vision pyramidale est tout simplement irréalisable. On veut des enfants pour le Québec et vite! On les veut pour financer un système qui requiert toujours plus de monde en bas pour un bien-être en haut. Vous ne voulez pas d’enfants, eh bien, nos experts ont aussi pensé à vous. 
 
   « Les célibataires sans enfants devraient contribuer aux programmes qui sont mis sur pied pour les familles parce qu'eux aussi jouiront des bénéfices qu'on en retirera. »
 
–Nathalie Burlone, chercheuse, Institut Vanier pour la famille
  
          Quoi de plus normal, vous aurez droit à une retraite aux frais des enfants, vous devriez contribuer pour ceux qui en font, soyons solidaires! À entendre tous ces experts, on croirait qu’avoir des enfants est une obligation sociale, une corvée à vie pour laquelle tous et chacun devraient bosser. Avoir des enfants est plutôt un choix, une responsabilité, un privilège. Avoir des enfants est générateur d’un bonheur incommensurable dont le prix à payer est entre autres, le sacrifice financier. Exiger que les célibataires payent pour un bonheur qu’ils n’auront peut-être jamais (ou dont ils ne veulent pas) est d’un égoïsme qui ne me surprend plus au Québec. Faire payer des choix individuels par tout le monde est désormais un sport national dans une province championne du contrôle des citoyens, des taxes et impôts en tout genre.  
  
          Chaque individu a la responsabilité de prendre en charge l’éducation de ses enfants ainsi que son propre avenir financier. Se préparer individuellement à la retraite est bien plus honorable que de se fier à nos rejetons pour le faire à notre place. Si les Québécois ne se réveillent pas et qu’ils continuent de se complaire dans la simili sécurité de nos mille et une mesures sociales, le réveil sera plus que brutal. La réalité nous rattrapera, reste à savoir quand et comment. 
 
 
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