Montréal, 22 avril 2007 • No 222

 

OPINION

 

Michel de Poncins écrit les flashes du Tocqueville Magazine et est l'auteur de quelques livres.

 
 

LA CULTURE DU MENSONGE

 

par Michel de Poncins

 

          Il est connu que le socialisme conduit à la culture de mort. L'on parle moins cependant de la culture du mensonge qui est l'une des bases du socialisme dans ses diverses manifestations.

 

          Soljenitsyne s'y connaissait puisqu'il avait subi le mensonge socialiste des pays de l'Est toute une partie de sa vie. Il avait dit en l'an 2000: « Ce n'est ni chaque jour, ni sur chaque épaule que la violence pose sa lourde patte: elle n'exige de nous que notre obéissance au mensonge, que notre participation quotidienne au mensonge et c'est tout ce qu'elle attend de ses loyaux sujets. Et c'est là que se trouve, négligé par nous, mais si simple, si accessible, la clef de notre libération: le refus de participer personnellement au mensonge. » C'est son hostilité au mensonge qui l'a conduit à recevoir un accueil plutôt frais dans les pays occidentaux, lesquels sont aussi pervertis par le mensonge.

          Le Bureau international du travail, ou BIT, s'est livré récemment à une enquête reposant exactement sur le mensonge. Il a mené ce que l'on appelle une opération de « testing » sur les villes de Paris, Lyon, Marseille, Nantes et Strasbourg. Pour cela, il a répondu à 2440 offres d'emplois en envoyant des CV identiques en tous points sauf pour l'origine du nom et du prénom. La conséquence est que les employeurs ont préféré, quatre fois sur cinq, des Français de souche, ceci lors de la procédure de recrutement qui a suivi.

          Il est évident que pour faire cette enquête, le BIT a menti puisqu'il a envoyé de fausses candidatures. Il est d'ailleurs étonnant qu'une telle pratique puisse juridiquement avoir lieu – la publicité mensongère étant sanctionnée par la loi, pourquoi l'envoi d'une candidature mensongère ne le serait-il pas puisque l'intention de nuire est manifeste? On peut parier cependant que, si une firme avait eu l'idée de porter plainte, même avec de bons avocats, elle ne l'aurait pas fait préférant se soumettre lâchement à la terreur révolutionnaire couramment en usage.

          Le Comité national contre le tabagisme (CNCT) a aussi, il y a peu, utilisé le testing et, ceci, au sujet de l'interdiction de vente de tabac aux mineurs de moins de 16 ans. Selon le comité, cette interdiction entrée en vigueur par arrêté en septembre 2004 était largement inappliquée. Il a testé 400 boutiques de tabacs et plus de 70% d'entre elles ont accepté de vendre un paquet de cigarettes à un jeune de moins de 16 ans qu'elles ne connaissaient pas. À cette fin, il a engagé des jeunes pour faire ce « travail » les conduisant et les entrainant ainsi à une démarche d'espionnage et de mensonge.

          Discriminer est un acte normal de l'intelligence. Savoir discriminer est même une condition nécessaire, quoique non suffisante, à la pratique habituelle de l'intelligence. Nous nous trouvons, aujourd'hui, devant une situation extraordinaire qui est d'abord l'interdiction de discriminer, mais ensuite aussi l'obligation de discriminer dans un certain sens. C'est donc une double interdiction de la pratique de l'intelligence ajoutée à une contradiction évidente dans la loi et à la pratique du mensonge. Cette situation est l'un des signes auxquels on reconnaît un pouvoir dictatorial. Briser la pensée des gens est depuis la nuit des temps à la fois l'objectif et le moyen des dictatures.
 

« Briser la pensée des gens est depuis la nuit des temps à la fois l'objectif et le moyen des dictatures. »


          La Halde, ou Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité, créée par Chirac en 2004, a en ligne de mire cet acte normal de l'intelligence et choisit elle-même de discriminer comme elle l'entend. Voici, sauf erreur ou omission, les 17 critères recensés aujourd'hui de discrimination interdite par cette « bourreaucratie »: l'âge, l'origine, la religion, le sexe, l'apparence physique, l'orientation sexuelle, la santé-handicap, l'activité syndicale, la conviction religieuse, l'opinion, la situation de famille, les caractéristiques génétiques, les moeurs, le patronyme, l'appartenance à une ethnie, l'appartenance à une nation, l'appartenance à une race!

          Au nombre de ses moyens d'action se trouve justement le « testing », forme affirmée du mensonge entrée dans notre droit et réservée principalement aux personnes au pouvoir.

          Il est sûr, étant donné les qualités supposées de ses dirigeants, que le « travail » est fort bien organisé. Il faut, pour y arriver, des fonctionnaires félons qui ont le devoir de mentir pour faire croire qu'ils sont capables d'être vraiment, valablement et honnêtement candidats à ceci ou cela dans le domaine du logement, du travail ou ailleurs. Ils subissent nécessairement une formation spéciale au mensonge, si l'on veut que le « boulot » obtienne des résultats et fasse tomber les agressés dans le piège adroitement tendu.

          Des séminaires de formation ont lieu probablement et des formules toutes prêtes sont imaginées et enseignées afin que les testeurs réagissent adroitement quand des situations inédites se produisent. On sait que la prétendue éducation nationale n'enseigne plus la morale et les résultats s'observent partout dans la vie de tous les jours... Mais la dictature a franchi un nouveau pas, quand elle a officialisé le mensonge comme mode de gouvernement couvert par des lois fabriquées à cet effet.

          Au même moment, nous lisons dans l'excellent mensuel Notre Amérique, fondé par Bernard Zimmern, que les Américains aveugles refusent de voir changer la texture des dollars, projet inspiré par le fallacieux prétexte de faciliter le maniement de ces billets à la minorité qu'ils représentent. L'argument de leur puissante association est textuellement le suivant: « L'obligation pour la société d'avoir à reconditionner toutes les machines qui acceptent des billets serait bien plus grande que le petit avantage offert aux aveugles d'être à même d'identifier les billets au toucher. Si la société pense que nous sommes incapables de savoir combien nous avons dans nos poches, elle peut penser que nous ne sommes pas compétents pour travailler et faire des affaires avec les autres. Et une telle croyance rendrait l'objectif de nous réintégrer complètement dans la société virtuellement impossible. »

          C'est un bel exemple de responsabilité personnelle dans une société fondée sur la liberté du marché et, sans doute, faut-il y voir aussi le refus du mensonge, lequel est sévèrement condamné depuis tous temps aux États-Unis.
 

 

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