Montréal, 15 août 2008 • No 258

 

OPINION

 

Michel de Poncins écrit les flashes du Tocqueville Magazine et est l'auteur de quelques livres.

 
 

L'UNION POUR LA MÉDITERRANÉE, UN AUTRE MONSTRE « BOURREAUCRATIQUE »

 

par Michel de Poncins

 

          La « république fromagère » (R.F.) est le système d'exploitation du peuple français organisée par les hommes de l'État à leur seul profit, cette exploitation se réalisant d'une façon tout à fait légale – ce qui est fort commode car cela permet de braquer la banque sans risquer d’aller devant les tribunaux.

 

          C'est pour cela qu'il faut la distinguer avec précision de la « république bananière » qui repose sur une exploitation illégale – les prédateurs risquent d’aller en prison en voulant exercer leurs rapines.

          L’essentiel de la richesse incomparable et inépuisable des hommes de l’État et des transferts indignes qu’ils réalisent en leur faveur repose sur la R.F., ceci contrairement à l’opinion commune qui les attribue à la république bananière.

          Cette république fromagère fonctionne sur plusieurs principes dont le principe des organismes qui s'énonce ainsi: « le foisonnement des organismes avec la création perpétuelle d'organismes inutiles est une des voies privilégiées qu’utilisent les hommes de l'État pour leur propre enrichissement ».

          Le nouveau projet d'Union pour la Méditerranée est un exemple frappant de la réalisation de ce principe. Ainsi s’explique le succès qu’il connaît même auprès d’États qui n’en voulaient guère au départ – ce succès, malgré la propagande, n’étant donc pas du tout dû à un prétendu talent diplomatique de l’actuel président français.

          Le phénomène « R.F. » existe peu ou prou partout dans le monde et aucun politicien ne recule devant la saveur d’un nouveau fruit à déguster à pleines dents !

          Il est évident que personne n'avait besoin, ni en Méditerranée ni ailleurs, de ce nouveau monstre administratif et juridique dont le coup d'envoi a été donné d'une façon solennelle et burlesque le 14 juillet dernier.
 

« La bataille pour le butin est déjà engagée. Plusieurs villes méditerranéennes rêvent d’attirer le siège du secrétariat général du nouveau monstre avec de prétendues retombées économiques et surtout beaucoup de frais pour recevoir ce prétendu honneur. »


          Nous souffrons déjà de l'Europe qui marche d'une façon tout à fait boiteuse et chaotique. Le désordre est inimaginable avec ses 27 participants et d’autres qui s’annoncent. La corruption s’exerce partout et les dépenses sont absolument gigantesques, inutiles et toujours somptuaires!

          Un autre organisme va pouvoir superposer son nouveau désordre avec les mêmes effets: l'Union pour la Méditerranée.

          Dans le projet d'union se trouvent certains pays qui n'ont rien à voir avec la Méditerranée. Il y aura donc vers le Sud une mauvaise copie du monstre européen. Pourquoi pas alors, sur la lancée, une Union pour la Baltique?

          Pour justifier l’impensable, les phrases idiotes ne manquent pas. Un des quelconques parrains (dans tous les sens du terme) a dit: « L’avenir de l’Europe est vers le Sud ». D’autres ont renchéri: « Le président a réussi une opération historique ». Et, encore, « L’UPM, c’est précisément une volonté d’égalité entre le Nord et le Sud ». Sic, sic et resic!

          Personne ne sort indemne en Europe de la tornade de règlements crachée à longueur de journée par la « bourreaucratie » européenne. Une autre tornade enchevêtrée et contradictoire avec celle-ci nous est promise avec l’UPM. Selon la tradition politico-administrative immémoriale, des comités inter-unions seront nécessaires avec, qui sait, des échanges d’ambassadeurs.

          La bataille pour le butin est déjà engagée. Plusieurs villes méditerranéennes rêvent d’attirer le siège du secrétariat général du nouveau monstre avec de prétendues retombées économiques et surtout beaucoup de frais pour recevoir ce prétendu honneur.

          Un programme de dépenses est déjà prévu: autoroutes de la mer, plan solaire, université méditerranéenne, autoroute Maroc-Égypte, plan PME… Tous ces projets devraient et pourraient se réaliser dans le cadre de marchés libres. Il n’en sera pas ainsi et inévitablement viendront de nouveaux impôts générateurs de pauvreté dans tous les pays adhérents.

          En définitive, n'y a-t-il pas à la base de cette idée tout à fait farfelue les intérêts personnels d'un seul homme ou d'un seul groupe de personnes espérant décrocher le gros lot, c'est-à-dire le poste de secrétaire général avec ses dépendances qui en général est, selon les règles non dites du partage du butin public, réservé à l'initiateur du nouveau projet?

          Rendez-vous dans quelques années.