Dépendance vers une future cause de paupérisation (Version imprimée)
par Michel de Poncins*
Le Québécois Libre, 15 août
2010, No 280.
Hyperlien: http://www.quebecoislibre.org/10/100815-7.htm


Tout le monde sait que le risque de la dépendance existe de plus en plus et ceci pour des raisons bien connues. Nous ignorons, cependant, si nous serons nous-mêmes touchés et comment: seul Dieu le sait. Le nombre des personnes âgées de plus de 60 ans va doubler d'ici 2050. Il y a 1,3 million de personnes de plus de 85 ans aujourd'hui en France et elles seront 2 millions dans cinq ans.

La peur diffuse de la catastrophe a conduit récemment le pouvoir à annoncer pour la conjurer le projet de création d'un cinquième pilier de la Sécurité sociale. Au risque d'étonner et même de choquer, nous affirmons que ce serait la faute à ne pas commettre.

Rappelons que la Sécurité sociale, la « sécu » selon le terme consacré, comprend quatre piliers: famille, accidents du travail, maladie, retraite. C'est au lendemain de la Deuxième Guerre mondiale qu'un gouvernement pratiquement communiste à créé ce véritable monstre qu'est devenu la sécu. C'était le 22 mai 1946, jour bien triste en vérité. La sécu est un monstre par ses dimensions titanesques qui, après des extensions successives, finit par absorber une large part de l'activité nationale. Le monstre, quels que soient les changements de statut depuis sa création, reste étroitement soumis à la dictature de syndicats dont la légitimité est plus que douteuse. Les résultats sont pitoyables. Depuis sa création il traîne un déséquilibre financier que l'on appelle maintenant couramment le « trou de la sécu » et qui, à lui seul, explique une grande partie de la paupérisation du peuple français.

Le désastre de l'assurance-maladie

Prenons en exemple le problème de l'assurance-maladie.

La prétendue assurance-maladie publique n’est pas une véritable assurance, laquelle supposerait une liberté de choix et non un simple prélèvement étatique décoré abusivement du terme d'assurance. Jusqu'en 1940, la liberté régnait dans le domaine de la médecine, de la pharmacie et des assurances. Tout le monde était soigné dans le cadre de contrats privés. Des assurances maladie étaient apparues avec un début de réglementation en 1930, sous le nom d’assurances sociales, ces réglementations ne concernant que les salariés de l'industrie et du commerce.

En 1946, la création de la sécu fut un coup de tonnerre. Il n'y avait – et il n'y a encore – aucune gestion, l'argent étant recueilli dans une sorte de grand réservoir et dépensé au jour le jour au fil des années, selon la volonté changeante des politiques, des syndicats et autres gérants de fait. C'est en 1960 que sont apparus les « URSSAF » (Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales) dont le sigle est lui-même significatif et qui, aujourd'hui encore, n’ont pas de statut légal, ayant été créées à l'époque à l'image du Parti communiste. Progressivement, le monopole a été étendu bien au-delà des salariés pour toucher l’ensemble de la population. La Cour des comptes, théoriquement chargée de surveiller, a déclaré publiquement qu'elle ne pouvait rien contrôler car il n'y avait pas de gestion.

La dérive financière est permanente. Voici des chiffres: en 2002, le déficit était de 3,50 milliards d'euros et, en 2009, de 22 milliards d'euros. Les prévisions pour 2010 sont de 30 milliards d'euros. Il fallut finalement taxer. Cela a conduit, en 1990, à l'introduction de la CSG (Contribution sociale généralisée) qui, étant évidemment insuffisante, a été complétée ensuite par la CRDS (Contribution pour le remboursement de la dette sociale). Ces impôts sont si commodes qu'il est question de les augmenter.

C'est sur plusieurs générations que l'erreur initiale a répandu l'effet de ruine dans tout le corps social. Le coût des assurances maladie sur le marché international est connu. Des exemples montrent qu'une famille nombreuse peut s'assurer pour 25% du coût que la sécu lui inflige et avec d'excellentes garanties.

Ce désastre n'est pas du tout dû au hasard, mais à la nature du système. Pour résumer, énonçons quelques facteurs de ruine qu'il contient comme du poison: système obligatoire, donc totalitaire, carriérisme politique, suppression de la responsabilité personnelle, soumission au bon plaisir des gérants de fait, inondation de réglementations avec l'effet destructeur habituel à toute règlementation, interdiction pratique de créer du capital pour préparer l'avenir, intervention illégitime de syndicats eux-mêmes illégitimes.

Voyons maintenant le problème de la dépendance.

Une future cause de paupérisation

Il s'agit d'un risque de la vie, certes important, mais il y en d'autres. En droit naturel, c'est à chacun d'entre nous d'être responsable de nos actes vis-à-vis de ces risques.

Quand il y a risque, il y a de multiples comportements personnels possibles avec évidemment d'innombrables positions intermédiaires. Le premier comportement est de ne pas s'en occuper en pensant que l'on se débrouillera pour avoir de l'argent le moment venu ou pour trouver des solutions familiales. Si nous n'apportions pas, sous la contrainte, notre tribut au monstre, l'économie correspondante permettrait de créer du capital pour faire face au risque, ce capital irriguant en outre l'économie tout entière avec un effet global de richesse indiscutable.

Le deuxième comportement est de s'assurer au maximum – là aussi la création de capital interviendrait par le truchement des assurances. Les assureurs sont habitués à la gestion des risques, y compris les plus considérables comme le risque automobile ou la responsabilité civile. Une assurance privée est un contrat que chacun ajuste suivant ses nécessités et suivant ses prévisions pour l'avenir, une fois le risque défini et en accord avec la compagnie. Les primes correspondent au profil du contrat. Chacun gère son précieux capital santé selon ses possibilités et ses désirs.

Le pouvoir, donc, projette abusivement aujourd'hui de recommencer l’erreur ancienne en étendant à nouveau les tentacules du monstre. Cela revient à jeter les bases d'une nouvelle et future cause de paupérisation de la France.

Bien entendu, les prétendus partenaires sociaux, qui sont surtout partenaires dans la rapine publique, sont invités à discuter du problème et s'y engagent avec délectation. Le plus surprenant est que le patronat suit au lieu d’en profiter pour prendre une position complètement négative. En fait, les représentants du Medef espèrent selon l'usage établi s'asseoir comme tant d'autres à la table du banquet républicain.

En effet, une des explications de la nouvelle calamité en cours d'édification, peut-être la principale, est que la future bureaucratie en gestation sera pour tous les acteurs une source immense de butin étatique à se partager dans l'allégresse en se donnant les apparences élégantes d'une fausse générosité.

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* Michel de Poncins écrit les flashes du Tocqueville Magazine et est l'auteur de quelques livres.