Trop d'impôts tue l'impôt (Version imprimée)
par Michel de Poncins*
Le Québécois Libre, 15 janvier
2013, No 307
Hyperlien: http://www.quebecoislibre.org/13/130115-5.html


L'adage qui veut que trop d'impôts tue l'impôt doit être rappelé avec force à l'heure où la folie taxatoire de Hollande-Ayrault ne s'arrête pas. Nous proposons l'adage inverse: moins d'impôts multiplie l'impôt. Mais avant de l'expliquer, évoquons cette furie taxatoire.

Les sages autoproclamés du Palais Royal ont censuré la taxe à 75% sur les hauts salaires. Elle serait injuste et confiscatoire dans certains cas. Quels que soient les arguties juridiques, c'est un raisonnement dénué de sagesse car tout impôt est confiscatoire. Quant à Hollande, il a promis sans tarder de la rétablir dès que possible par un texte adapté, ce sur quoi les connaisseurs disent que c'est impossible. Pour bien montrer qu'il ne perdait rien de son allant, il a remarqué que la majorité des nouveaux impôts prévus pour 2013 étaient passés sans encombre, ceci pour un total de plus de vingt milliards.

Les médias ont détaillé le menu des réjouissances pour cette année 2013. Tout le monde est taxé: entreprises, riches, pauvres, familles, retraités, titulaires de niches, stock-options, retraites chapeaux, etc. Par exemple, pour un prétexte environnemental, le pouvoir, sans que personne ne proteste vraiment, vient de créer une écotaxe sur les camions. Tout le monde en souffrira par réduction du pouvoir d'achat. Grâce à la solidarité républicaine, rien n'est prévu pour rogner les privilèges scandaleux des élus nationaux et locaux...

Expliquer l'adage

L'explication de l'adage et de son contraire est simple. L'excès d'impôt ralentit nécessairement la croissance et diminue donc la matière à taxer: au bout du compte l'impôt pourrait disparaître. S'il n'y a plus de riches, il y aura que des pauvres pour payer. L'adage inverse s'explique; l'allègement et, mieux encore, la suppression totale de certains impôts déclenche la création de richesse.

À cet égard, il faut mettre en vedette le rôle des entrepreneurs, seuls vrais créateurs de richesse. En combinant sans cesse des capitaux, du travail, de la recherche, et maints autres éléments, ils créent des surplus qui n'existeraient pas sans eux; ce type d'action est aussi bien valable pour l'entreprise d'un seul que pour celle de milliers de personnes. La suppression de certains impôts les frappant durement déclenche le cercle vertueux de la création de richesse et augmente la base fiscale des impôts restants.

À Londres, il y a une nouvelle Silicon Valley qui fonctionne très bien: Tech City. Le nombre de start-ups y a triplé depuis deux ans, pour atteindre 700 entreprises. Les Français qui veulent fonder une start-up sont sûrement attirés par Tech City. Des entrepreneurs importants avec des noms prestigieux partent de la France en disant qu'ils ne partent pas pour des raisons fiscales: personne ne les croient.

Des facteurs divers s'ajoutent dans l'exode: instabilité des lois fiscales, risque de nationalisation, difficultés pour la transmission des entreprises. Les gens qui prennent des risques importants en créant une entreprise veulent pouvoir récolter le fruit de leur travail.

Bien entendu, il ne peut être question de diminuer seulement des impôts, ce qui ne crée pas de choc, car un impôt diminué revient toujours. Il faut supprimer complètement certains impôts bien ciblés: plus de déclarations, plus de fonctionnaires, plus de bureaux, plus de contentieux, plus de contrôles.

L'économiste Arthur Laffer avait bien mis en lumière l'adage en traçant sa célèbre courbe. C'est une modélisation économique fondée sur l'idée que la relation positive entre la croissance du taux d'imposition et la croissance des recettes de l'État (l'État étant défini au sens large, c'est-à-dire que le terme représente ici toutes les administrations publiques) s'inverse lorsque le taux d'imposition devient trop élevé. Cela vient, comme expliqué plus haut, de ce que les agents économiques ne sont plus incités à travailler.

Un cercle vertueux

Dans la perspective du cercle vertueux, si un pouvoir voulait l'appliquer, il devrait réfléchir à l'équilibre des comptes publics sous l'oeil attentif des marchés. Il pourrait s'appuyer sur le jeu mécanique du nouvel adage, mais cela risquerait de ne pas être rapide et suffisant.

Il serait impératif de faire des économies; là aussi il ne faudrait pas se contenter de mesurettes. Les économies devraient être massives, immédiates et certaines. Dans un pays socialisé à 70%, la marge de manoeuvre est immense.

Un pouvoir le fera-t-il? Ce serait un coup de tonnerre, la France étant accusée par tous ses voisins de ne pas se réformer. Le pouvoir actuel pourrait le faire: il faudrait à cette fin qu'il abandonne ses intérêts électoraux pour s'occuper enfin du bien commun.

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* Michel de Poncins écrit les flashes du Tocqueville Magazine et est l'auteur de quelques livres.