Montréal, 1er septembre 2001  /  No 87  
 
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François Morin est conseiller financier dans la région de Québec.
 
OPINION
 
LES RISQUES DU FAST-FOOD
 
par François Morin
  
  
          Je viens tout juste de terminer la lecture du journal Voir du 16 août 2001. L'entrevue de Tommy Chouinard avec Eric Schlosser a vite fait d'attirer mon attention. À peine avais-je posé les yeux sur le texte que ma main agrippa ma plume pour entourer, biffer, annoter les différents points traités. Eric Schlosser est un activiste en guerre contre le fast-food (particulièrement McDo) et ses idées ne manquent pas d'intérêt. En fait, il tire dans toutes les directions, c'est pourquoi je n'ai retenu qu'un aspect à débattre.
 
          La lecture de tels articles me laisse toujours perplexe. Les activistes (de droite ou de gauche) ont toujours des statistiques percutantes, des situations catastrophiques à nous « garrocher » à la figure. Ces techniques ne visent qu'à saisir l'auditoire et ainsi le détourner des vraies questions. Elles enflamment les passions et font monter les gens aux barricades. Je déplore cette attitude non rationnelle qui fait naître de faux débats qui n'ont pas lieu de voir le jour. L'article dont je vous parle aujourd'hui est bourré de ce genre de nouvelles sensationnelles et percutantes. Des phrases chocs, des stats sorties de leur contexte. 
  
          Voici: Il semblerait que les abattoirs desservant les grandes chaînes de restauration rapide ne respectent pas les règles élémentaires d'hygiène. Il y aurait eu quatre décès en 1993 dans un fast-food dont la viande était contaminée à la bactérie E-coli, 200 personnes hospitalisées… Ouf. Une fillette aurait croqué dans une tête de rat. Une étude démontre que 7.5% de la viande à la sortie d'un abattoir serait contaminée à la salmonelle. Les gouvernements n'auraient pas autorité pour agir… 
  
          Je répondrai ceci: Quatre morts en 1993 par la bactérie E-coli, c'est peu. Croquer dans une tête de rat n'est certainement pas agréable mais vu la quantité de viande traitée, l'erreur est possible (la poursuite entamée déterminera l'indemnité que la chaîne aura à payer). Dans le même article, M. Schlosser nous dit que chaque jour, 1% de la population mondiale mange chez McDo (sans compter les autres chaînes de fast-food). Cela donne 2.5 milliards de visites annuelles. À ce compte, quatre décès, c'est minime. Il y a à chaque année au Québec de un à deux décès dus à la maladie du hamburger. La viande contaminée dans les abattoirs... à ce que je sache, les abattoirs ne fournissent pas que McDo. Les supermarchés s'y approvisionnent aussi non? Pour ce qui est de l'autorité des gouvernements, vu la problématique, ils vont certainement intervenir ne croyez-vous pas!!! 
  
Même petit jeu 
 
          En contre-attaquant Schlosser, je joue finalement à son petit jeu. J'utilise ses armes et je les retourne contre lui. Je ne devrais pas tomber dans cette facilité mais c'est plus fort que moi. Lui de mentionner qu'il y a eu quatre décès en 1993, moi de rétorquer que c'est peu. ENFANTIN!!! Comment est arrivé ce fâcheux accident? Le problème vient-il d'une négligence? Aurait-il pu raisonnablement être évité? L'abattoir en question en était-il à sa première offense? Etc. Et moi qui ne fais guère mieux... 2.5 milliards de visites. J'oublie de mentionner que « visite » ne coïncide pas avec achat de hamburger. Il faut éliminer les déjeuners, les « siroteux de café », ceux qui ne mangent pas de hamburger, etc. Et de plus… un décès, c'est un de trop, peu importe la quantité servie. Si une erreur a été commise, on doit compenser. Ce genre de discours, c'est de la propagande, dans un sens comme dans l'autre et je le déplore. 
  
          Les libertariens aussi sont souvent à couteaux tirés avec la droite, la gauche, le centre, le centre gauche; finalement avec à peu près tout le monde. Une des raisons majeures de ces divergences n'est pas, comme semblent le croire nos détracteurs, l'objectif recherché. Je crois plutôt qu'il s'agit d'un simple problème de communication et des moyens à entreprendre pour arriver à nos fins. 
  
     « Il est certain que comme M. Schlosser, je désire le meilleur hamburger possible. Contrairement à lui, j'accepte lorsque je paye 0.69 $ d'avoir un goût et une qualité de 0.69 $. »
 
          Dans la première partie de mon texte, je fais allusion aux abattoirs et à leurs problèmes de contaminations. À écouter M. Schlosser, nous sommes pratiquement en danger de mort. Moi, je crois qu'il déraille et que son seul but est de semer la paranoïa dans la population. Il exagère peut-être, je sous-estime probablement. Il veut des policiers (inspecteurs) pour surveiller, je dis qu'en tant que consommateur, on doit manifester ouvertement ses inquiétudes, et pourquoi pas, boycotter les chaînes de restauration rapide. 
  
          Il est certain que comme M. Schlosser, je désire le meilleur hamburger possible. Contrairement à lui, j'accepte lorsque je paye 0.69 $ d'avoir un goût et une qualité de 0.69 $. Lorsque je veux un vrai hamburger, je vais à l'un de mes restos favoris, Chez Victor. Il y en a deux à Québec. Un vrai délice... à 6.25 $ pièce. Eric Schlosser croit qu'une police du hamburger est nécessaire. Je crois que l'État ne fait guère mieux que le privé en ce domaine. Pensons à l'eau contaminée en Ontario ou à la Direction de la santé publique de Québec qui a attendu l'épidémie de méningite avant de vacciner. Nous voulons tous la meilleure qualité au meilleur prix et ça existe. Il s'agit de faire des choix et ça, c'est relatif. 
  
Prendre ses responsabilités 
  
          En conclusion, je terminerai par ces quelques réflexions. À la fin de son article, M. Schlosser nous dit: « Je sais quand même que c'est le droit de tout le monde d'acheter du fast-food... mais il faut savoir prendre la responsabilité de ce que l'on avale. » Je ne saurais mieux dire!!! Ce que j'ai de la difficulté à comprendre, ce sont les propos souvent contradictoires de tels auteurs. Tout ce bla bla contre McDo et ses effets néfastes sur la santé, l'urgence de réglementer, les risques de ceci, de cela, etc. Et à la fin, cette petite phrase: « quand les consommateurs se lèvent et décident de ne plus acheter de fast-food, les compagnies n'ont pas le choix de réagir, car elles sont sensibles uniquement aux profits ». 
  
          Voilà! Finalement pourquoi tout ce tapage, toutes ces demandes quand la meilleure manière de « régler » le problème c'est de cesser d'aller chez McDo et d'encourager Victor. Tout comme M. Schlosser, je suis le premier à le faire même si à l'occasion, je retombe dans le vice du hamburger à 0.69 $ voulez-vous ben me dire ce qui me prend d'acheter du McDo quand il y a Victor... Je tiens à préciser à ma défense qu'il m'arrive de manquer et de temps ou de moyens et que McDo m'aide à boucher les trous de mon horaire et de mon budget. Que voulez-vous, personne n'est parfait!!! Au moins, j'en suis conscient et je m'assume. 
 
          Monsieur Schlosser, je vous en prie, continuez de sensibiliser les gens mais cesser de les prendre pour des enfants. Vous n'avez point à terroriser la population, mais seulement à l'informer. Je suis très heureux de découvrir les dessous de McDo, mais si je juge que mon petit bonheur c'est un Bic Mac et ce au détriment de mon tour de taille, ce sera mon choix. Je vous suis reconnaissant de me prévenir, je l'apprécie et cela m'incitera très certainement à diminuer ma consommation de junk food. Continuez de m'informer, de me prévenir: des gens renseignés prennent des décisions éclairées. 
 
 
 
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