Montréal, 29 septembre 2001  /  No 89  
 
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COURRIER DES LECTEURS 
 
NON À LA VIOLENCE ET À LA HAINE
 
 
Re: DERRIÈRE LES ATTENTATS, UN COLLECTIVISME À MULTIPLES VISAGES, le QL, no 88. 
 
          J'aime vos articles, qui sont toujours censés. Hier, au bureau, on nous demandait de garder le silence, d'allumer un cierge, etc. J'ai réagi en disant que j'étais d'accord pour cette belle solidarité, mais que je n'étais pas d'accord avec Bush et les médias qui parlent de vengeance, fruit de la haine. Certes, c'était là un geste de guerre; certes il faut internationalement éradiquer le terrorisme et vite (on devrait faire de même pour la mafia), mais tuer des innocents et des enfants et des animaux en bombardant tel ou tel pays, là non, je ne suis pas d'accord. Je ne suis pas d'accord pour que l'on continue de promouvoir la haine et la violence qui ne mènent nulle part. 
  
          Avons-nous assez d'imagination en tant qu'humains pour trouver autre chose que le « oeil pour oeil, dent pour dent »? La Presse titrait deux jours après l'attentat « La vengeance viendra » en très grosses lettres. Ne sommes-nous pas des gens assez conscients et lucides pour savoir que c'est là une manipulation, indirecte peut-être, de l'opinion publique? Les médias n'ont-ils pas encore compris que cela engendre et renforce la haine chez plusieurs?
 
          Je trouve que Bush agit comme un petit garçon qui joue au Far West, sans penser aux conséquences: et si la riposte à la riposte était une guerre bactériologique? Nous devons à tout prix empêcher M. le Président d'agir dans le sens d'une guerre ou de bombardements. Il faudrait plutôt arrêter les responsables de cet acte de terrorisme et de guerre et les juger pour ces crimes. 
  
          Nous en avons tous un peu marre de ces Américains qui se croient les maîtres du monde, même si, par ailleurs, nous les aimons et aimons leurs réussites. Mais nous avons besoin d'eux, de leurs forces; nous savons les admirer justement dans des moments cruciaux où il faut tout tenter pour sauver des vies, les sortir des décombres. Je vous jure qu'en voyant Monsieur le Président marcher dans les rues de New York, je n'ai vu qu'un petit cow-boy descendu de son cheval prêt à peser sur la gâchette. Et j'avais envie de dire: Cesser de jouer aux enfants! 
  
          Félicitations pour vos prises de position, 
  
Odette Bélanger
  
  
 
 
 
UNE CHIMÈRE PHILOSOPHIQUE
 
 
          J'ai parcouru l'oeuvre de Hayek. Il semble évident que vous partagez plusieurs de ses thèses. Vous vous opposez à l'État avec véhémence. Bien que je partage plusieurs de vos inquiétudes quant à l'État, le plus froid des monstres froids selon Friedrich Nietzsche, je me questionne quant à la nécessité d'y mettre un terme pour le remplacer par des hommes qui, somme toute, pourraient facilement abuser de leur petits pouvoirs respectifs s'il n'y avait pas d'arbitres ni de règles pour la vie en société. Abolir l'État, suppose une bonté du citoyen qui me semble une chimère philosophique propre à Jean-Jacques Rousseau: l'homme naît bon, mais c'est la société qui le corrompt. 
 
          L'homme ne naît ni bon ni mauvais, je le concède, et s'il revient aux citoyens de se doter de la société qu'ils méritent, sans l'intervention de l'État ou des tribunaux, on fera travailler des enfants de 8 ans dans des mines et les compagnies auront leurs mercenaires pour écraser toute velléité de s'exprimer librement. Nous allons vivre dans des vendettas sans fin, comme en Albanie, suite à l'effondrement du communisme. Ils ont tenté d'appliquer un modèle libéral absolu et ce fut la guerre civile entre les citoyens... L'Albanie a dû revenir vers un modèle de social-démocratie pour assurer une certaine paix entre les citoyens, condition nécessaire à la vie... 
 
          Le mouvement libertarien repose sur des prémisses tout aussi utopiques que celles du marxisme, du capitalisme ou de l'anarchisme. Les mouvements de pensée, les théories économiques ou les religions se perdent dans le détail et n'ont jamais une vue d'ensemble, quoi qu'on en dise. Cela réconforte quelques intellectuels en mal d'une réponse s'appliquant à tous les aspects de la vie. Cependant la vie ne se plie pas aux théories. Sa complexité empêche d'appliquer des « solutions » unidirectionnelles. Il faut synthétiser, constamment, et assurer un cadre de liberté d'expression pour toutes les composantes de la communauté, même pour vos ennemis, même pour ceux qui voudraient encore plus d'État et qui sont susceptibles de créer de nouveaux goulags pour des gens comme vous et moi. C'est une question de sécurité publique pour tout un chacun, car les excès des uns provoquent les colères des autres... Moins d'État, c'est plus de communistes et d'anarchistes dans les rues, plus d'assistés sociaux et de chômeurs qui rêveront de porter votre tête en haut d'une pîque... Je ne suis pas prêt à voir cela. Il convient donc de composer avec la bureaucratie et de l'humaniser autant que faire se peut, au même titre qu'il faudra humaniser les capitalistes... 
 
          Beaucoup d'intellectuels libéraux ont combattu la naissance des syndicats au début du siècle. Les syndicats ont permis de redonner une dignité à ceux et celles qui travaillaient pour trois fois rien tandis que les riches philosophaient dans leurs salons. Je proviens d'un milieu très pauvre. Vais-je combattre les seuls outils qui m'ont permis d'avoir accès à l'éducation et à la liberté? Vais-je laisser au soin des propriétaires de décider de mon sort, tout simplement parce que je suis né locataire de ce monde? Vais-je vivre ma vie de paria ou de tchandala sans rechigner, tout simplement parce que Hayek a dit que l'État n'est rien et qu'il faudrait revenir au Livre de Manou, tant qu'à y être, au système des castes, tel qu'il se pratiquait en Inde? Accepter son sort pour qu'une clique de pourris soient plus libres que d'autres? Accepter de nouvelles règles du jeu dans lesquelles certains s'en tireront mieux que d'autres? Ce ne seront pas nécessairement les meilleurs, mais les plus violents... 
 
          Cela dit, je n'ai pas la science infuse. Il est fort possible que je me trompe. Je me suis souvent trompé au cours de ma vie... Comprenez bien que je prends le temps de vous envoyer cette missive parce que je partage au moins 40% des vues des libertariens... C'est beaucoup, vous ne trouvez pas? 
 
          Bien à vous, 
  
Gaétan Bouchard
Trois-Rivières
 
 
 
ATTENTION!
    Si vous en avez marre de vivre dans une société où l'hystérie nationaliste domine tous les débats; dans un pays où les taxes, les réglementations omniprésentes et le paternalisme des gouvernements briment la liberté individuelle et restreignent le dynamisme économique; dans une culture où le moutonnisme et l'égalité dans la médiocrité sont plus valorisés que l'individualisme et la compétition; dans un monde intellectuel où les soi-disant « consensus nationaux » promus par une élite déconnectée servent de prétexte pour éviter les débats rationnels; 
  
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