Montréal, 15 avril 2008 • No 255

 

OPINION

 

Xavier Collet est responsable du site de l'ADEL.

 
 

AU-DELÀ DES MANUELS,
DES ÉLÈVES SOUS INFLUENCE

 

par Xavier Collet

 

          La coloration gauchiste toute particulière des manuels d’économie (sciences économiques et sociales, mais aussi économie-droit pour les STG et BTS) dans le système d’enseignement français a été dénoncée à titre individuel par de nombreux parents d’élèves au cours des dernières années, mais aussi par SOS Éducation, par la Fédération des Parents d'élèves de l'enseignement public, des parlementaires et des ministres. L’ex-ministre des Finances Francis Mer a parlé du caractère marxiste de certains manuels. Pourtant rien n’a vraiment bougé depuis, même si la presse (Capital, Le Figaro, L’Expansion, Liaisons sociales, sans compter la presse internationale) s’est jointe à cette interrogation légitime sur le contenu de ce qui est enseigné.

 

          Si le statu quo triomphe, c’est que toute remise en cause de l’orientation des manuels fait l’objet d’une levée de boucliers contre le patronat, qui serait le véritable instigateur des critiques émises sur la vision partiale de l’entreprise, de la mondialisation et de l’économie de marché. C’est là la thèse de Philippe Frémeaux, directeur de la publication Alternatives Économiques, qui titrait « Le patronat à l’assaut des sciences économiques et sociales » en avril 2004. Cet article qui faisant référence à plus d’une reprise à l’Association des professeurs de sciences économiques et sociales (APSES) illustre bien la façon tantôt violente, tantôt conciliante, avec laquelle certains enseignants partisans entendent disqualifier toute critique de partialité dans leur enseignement de la discipline.

          Reprocher un parti pris ne pourrait venir que d’une tentative de remise en cause de l’indépendance des enseignants à l’instigation de lobbies patronaux, en l’occurrence l’Institut de l’entreprise. Cet institut mènerait une opération de « reconquête idéologique » (terme révélateur) des sciences économiques et sociales, à travers notamment un site Internet de ressources pédagogiques baptisé Melchior, « pur instrument d’influence, pour ne pas dire de propagande », une revue du nom de Sociétal, et des stages en entreprise proposés aux enseignants. Frémeaux reprend ensuite la charge d’ATTAC contre l’université d’automne au Lycée Louis Le Grand, organisée par l’Institut de l’entreprise et le CNED et animée par Les Échos, qui aurait été une vraie opération de propagande promondialisation (puisque le socialiste devenu patron de l’OMC, Pascal Lamy y était) financée par le ministère.

          Il écarte aussi la critique portant sur le caractère engagé de sa publication en répondant tout à fait sérieusement que les enseignants apprécient « Alternatives Économiques, jugé en fait moins "engagé" qu’un grand nombre de ses concurrents, en raison de son indépendance à l’égard du pouvoir économique ». Ce qui l’amène à constater, mais surtout à considérer comme bien légitime que les enseignants soient acquis à une gauche anticapitaliste:
 

          Une grande partie des enseignants de sciences économiques et sociales jette un regard distancié sur le monde actuel. Rien de très surprenant: alors qu’un passionné de philosophie ou de lettres classiques n’a guère d’autres débouchés que l’enseignement, les enseignants de sciences économiques et sociales disposent généralement de diplômes qui ouvrent la possibilité de faire carrière dans le privé. C’est donc, pour la plupart, par choix qu’ils ont décidé d’embrasser la carrière d’enseignant, un choix parfois dicté par leurs convictions.

          Enfin il nuance l’emprise dont seraient victimes les élèves: « Ne surestiment-ils [les patrons] pas l’influence que les enseignants ont sur leurs élèves? Que reste-t-il dans les têtes après une première et une terminale ES? » Une déclaration étonnante qui permettrait de légitimer l’enseignement du n’importe quoi, et donc qui minimise de beaucoup l’intérêt que les élèves portent à cette matière, ainsi que l’implication des professeurs. Mais si vraiment il leur reste si peu selon Philippe Frémeaux, à quoi servent les sciences économiques et sociales au lycée sinon à distiller des a priori non étayés par une véritable connaissance théorique?
 

Sortir du fantasme sur les manuels?

          Dans « Manuels d’économie, pour sortir du fantasme », Pascal Binet, un des auteurs des manuels, entend démontrer que ceux-ci ne font que donner un éclairage qui ferait consensus chez les enseignants. Et effectivement, l’édition scolaire s’adresse à des prescripteurs et doit donc les séduire. Quant aux enseignants, ils ne peuvent faire preuve que d’impartialité: « Notre système éducatif tant brocardé forme des apprentis citoyens déjà capables de mettre en doute un discours systématique porteur d’opinions. Et croire qu’on pourrait leur “bourrer le crâne” en enseignant une vision positive de tel ou tel acteur économique et social est d’une vanité qui pourrait prêter à sourire. »

          Il n’y aurait donc rien à redire au monde merveilleux de l’enseignement des sciences économiques et sociales, s’il n’y avait ces lobbies dont il ne cherche pas à comprendre les motivations: « Malheureusement, certains entrepreneurs d’opinion et de morale en ont fait un objectif de leur existence. Les médias, soumis, relaient. » Ceux qui s’en prennent aux manuels seraient donc représentatifs d’une idéologie dominante relayée par les médias?

          Il faut creuser un peu pour savoir ce que Pascal Binet sous-entend. Cette information nous est donnée par le site d’observation des médias Acrimed. Y est reproduit un courriel du 8 février 2006 de Pascal Binet au directeur de France Info, Michel Polacco, avec copie au Conseil supérieur de l’audiovisuel ainsi que de nombreuses réactions de professeurs objectifs qui s’empressent de relayer les pressions exercées auprès du CSA à travers leurs nombreuses listes de discussion:
 

          Toutes les chroniques et journaux particuliers en matières économiques ne reflètent que le point de vue appelé communément « libéral », voire directement celui des syndicats d’’entrepreneurs. [...] Le problème est que ces chroniques ne connaissent aucun contrepoints, présentant des points de vue d’écoles de pensée différentes, et tendent à faire croire aux auditeurs qu’il s’agit de « la » vérité économique. Merci de voir ce que l’instance de régulation peut faire pour corriger cette anomalie dans l’expression du pluralisme.

          On comprend donc ce qu’est un biais idéologique pour Pascal Binet: il s’agit d’un biais libéral. Or effectivement on ne trouve pas grand-chose de libéral dans les manuels d’économie ou dans les cahiers des élèves. C’est dommage que Pascal Binet s’indigne à sens unique, surtout quand il semble porter l’étendard de l’objectivité. Quant au libéralisme des chroniques de France Info, il ne m’est pas paru flagrant.

          L’article de Philippe Watrelot (« Manuels d’économie: arrêtons les idées reçues! »), professeur de sciences économiques et sociales et président de l’association CRAP-Cahiers Pédagogiques, va dans le même sens. La remise en cause du caractère étatisant des manuels est aussi conçue comme une attaque récurrente contre sa discipline menée par des lobbies patronaux. Elle reflèterait encore une fois la méconnaissance des programmes et l’ignorance de la spécificité d’un enseignement destiné à comprendre notre monde.

          Pourtant, on ne peut croire ces deux arguments rabâchés après avoir lu les manuels qui, s’ils abordent des problématiques libérales, prennent soin par les questions posées d’orienter les réponses et la réflexion des élèves dans un sens systématiquement hostile à ces problématiques. Enfin ce « circulez, il y a rien à voir » devient agaçant quand il est formulé par des gens aussi « objectifs ».

          Il n’est, en effet, pas inintéressant de savoir que Philippe Watrelot a co-animé un atelier intitulé « L’économie dans l’enseignement secondaire forme-t-elle des citoyens? » lors des rencontres nationales sur l’enseignement de l’économie organisées par l’institut de recherche de la FSU et ATTAC, en partenariat avec l’Association des professeurs de sciences économiques et sociales (APSES), Alternatives Économiques, la Ligue de l’enseignement, la CGT, le SNES et le SNESUP.
 

L’APSES monte au créneau

          Mais c’est surtout de l’Association des professeurs de sciences économiques et sociales que vient la défense des manuels. Cette association qui revendique dans ses rangs 20% des professeurs de cette discipline, compte nombre de rédacteurs des manuels. On comprend donc qu’elle reprenne le couplet de manuels aussi objectifs que possible.

          Aussi objectifs peut-être que Le libéralisme n’a pas d’avenir, l’ouvrage de Guillaume Duval, rédacteur en chef d’Alternatives Économiques. Un livre qui plaît à l’APSES qui, avec ATTAC, et les Amis du Monde Diplomatique, a participé à sa présentation au public. D’ailleurs Edwige Corcia, secrétaire nationale de l’APSES, dans une entrevue donnée à L’Humanité du 27 octobre 2003, avoue un étrange sens de l’objectivité et de la défense de la laïcité: « Or l'école a-t-elle vocation à développer particulièrement cette idéologie de la mondialisation? Le principe de la laïcité est en danger car le dogme de l'entreprise n'est-il pas une forme de religion? » De tels propos sont bien évidemment surprenants de la part d’un enseignant, a fortiori de la secrétaire générale de l’APSES.

          Ces arguments de lutte des classes démontrent bien que certains professeurs vivent loin des réalités et ont trop lu Bourdieu. La défense du capitalisme ne tient pas lieu d’idéologie dominante en France, et l’école n’est pas un lieu de résistance à l’idéologie dominante. La réalité n’est pas celle-là, puisque ce sont avant tout les usagers de l’Éducation nationale qui critiquent une vision à sens unique répercutée par des manuels accordant une place trop importante aux écoles de pensées s’affichant clairement comme antilibérales. Les autres écoles ne sont pas absentes, mais descendues en flèche alors même qu’aucune approche critique n’est développée pour les théories antilibérales.

          Critiquer les manuels ce n’est pas « jouer le jeu du patronat »; c’est demander non seulement plus d’équilibre dans les sources mais aussi dans le traitement desdites sources. Cette demande doit être suivie pour qu’enfin cet enseignement respecte mieux l’impératif de neutralité qui est à la base du principe de laïcité. Les manuels sont la partie émergée de l’iceberg. En effet, comme le disent ses avocats, ils ne se substituent pas à l’enseignant. En réalité ce sont aussi les autres supports de cours et le militantisme de certaines officines qui posent surtout problème.
 

« Critiquer les manuels ce n’est pas "jouer le jeu du patronat"; c’est demander non seulement plus d’équilibre dans les sources mais aussi dans le traitement desdites sources. »


          Nous pouvons mieux comprendre l’action de ces officines dans nos écoles à travers les multiples prohibitions introduites par les enseignants et les pressions sur les enseignants qui ne partagent pas leur point de vue.
 

Pédagogues ou alter multicartes?

          La stratégie de conquête idéologique dans l’éducation, synthétisée sur le site d’ATTAC, mérite tout l’intérêt des décideurs et des parents d’élèves.

          Le rédacteur y présente les efforts réalisés par des militants enseignants pour constituer une internationale de l’éducation à travers le Conseil international du Forum mondial sur l’éducation (FME) dans le cadre du Forum social mondial (FSM). Le FME est présenté comme « la première initiative sectorielle prise en liaison avec le FSM. Elle reste celle qui est la plus élaborée: le FME a un Conseil international propre; il a adopté un texte d’orientation. »

          L’article fait le point sur les organisations qui adhèrent en France à cette dynamique et qui apparaissent au grand jour lors de forums sociaux. Il constate que les syndicats d’enseignants « donnent le ton dans le débat public sur l’éducation [...] particulièrement quand il s’agit du contenu de l’éducation, voire des approches pédagogiques. » Il regrette le rôle trop faible de mouvements pédagogiques et d’associations de professeurs tout en mettant en lumière les succès de l’APSES et d’ATTAC dans la participation aux débats éducatifs.

          Ce réseau d’associations, d’une légitimité contestable, ne supporte d’ailleurs pas d’être écarté des débats éducatifs. Plus encore, il entend mener les débats et n’hésite pas à faire usage de l’agit-prop lorsqu’il ne se sent pas partie prenante.

          Pour se faire entendre davantage, les enseignants de ces réseaux jouent souvent le multi-carte. Un professeur d’économie adhérant à l’APSES sera souvent sympathisant voire adhérent d’ATTAC ou encore de l’APED (Association pour une école démocratique). En tant que parent d’élève il s’engagera à la FCPE. Le petit monde des altermondialistes ne draine pas autant de militants qu’on le croit, il suffit de fréquenter les listes de discussion diverses qui leur sont dédiées pour y retrouver les mêmes participants, dont une majorité d’enseignants peu ouverts aux débats d’idées. Toute opinion non partagée par ce petit monde vaut en général des attaques ad hominem et des procès d’intention.

          Une attitude que l’on retrouve sur le terrain scolaire: ce qui n’est pas objectif est ce qui ne va pas dans leur sens, et ce qui ne va pas dans leur sens n’a pas de raison d’être dans nos écoles. C’est ainsi que des actions lancées contre des initiatives à visée éducative vont faire l’objet des foudres de collectifs d’associations, toujours les mêmes.

          Ainsi, Attac a manifesté contre la « mainmise des multinationales sur l’enseignement », en réalité contre une université d’automne réservée à des professeurs de sciences économiques et sociales sur le thème « Les entreprises dans la mondialisation » organisée en octobre 2003 en partenariat entre le ministère de l’Éducation nationale, l’Inspection générale des sciences économiques et sociales, le CNED et l’Institut de l’entreprise. ATTAC parle là d’une manipulation scandaleuse organisée par le ministère tout en ayant exigé d’être présent pour expliquer les méfaits de la mondialisation à ce colloque. L’APSES se plaint de ce que ses membres aient été évincés: « Toutes les personnes syndiquées connues, à l'APSES par exemple, n'ont pas réussi à être invitées » affirme Edwige Corcia, sa secrétaire nationale.

          Eh oui, il n’y a pas de raison pour que les enseignants altermondialistes n’expliquent pas à leurs collègues ce qu’ils serinent à nos enfants dans les classes de SES ou d’économie-droit.
 

Pas d’idéologie économique dans l’enseignement public!

          Quand l’entreprise, débouché logique de toute formation, montre son nez, ATTAC réagit comme propriétaire de l’éducation et des cerveaux des élèves. Pour le Collectif ATTAC éducation IDF, « La neutralité scolaire est le premier et le plus épais rempart contre l’intrusion de toute idéologie économique dans l’enseignement public. » Le manifeste d’ATTAC est d’ailleurs très clair sur la stratégie à tenir vis-à-vis du monde de l’entreprise: « En France, compte tenu de la spécificité de son système éducatif – fondé sur l'école laïque et publique – c'est de l'intérieur même du secteur public que se mène l'offensive libérale, toujours en référence aux "valeurs de l'entreprise", ramenées aux seules valeurs… des employeurs. »

          Ces valeurs de l’entreprise il faut s’en méfier en se rappelant le tropisme exploiteur de l’entrepreneur, Alternatives Économiques, dans l’article « Entre utopie et contre-pouvoirs » du hors série no 45 bis de septembre 2000, rappelle que:
 

          Historiquement, l'entreprise est donc d'abord un lieu d'enfermement. De même qu'on enferme les fous à l'âge classique, le capitalisme se développe d'abord en enfermant des hommes, des femmes et des enfants au fond de la mine et dans les ateliers de l'industrie naissante. Le travailleur est privé de tout droit, sinon celui d'obéir aux injonctions patronales. Le rassemblement réalisé au sein de la manufacture est d'abord un moyen de contrôle, afin d'allonger la durée du travail et d'éviter toute flânerie ouvrière. Ce péché originel du capitalisme, qu'on retrouve aujourd'hui dans bien des pays dits émergents, là où le salariat s'étend en cassant les modes d'organisation anciens, a longtemps fait du salariat une des formes les plus achevées de l'exploitation du travail humain, au même titre que le servage ou l'esclavage.

          [...] Le capitalisme ce n'est pas seulement la dépossession du travailleur de la propriété des moyens de production, c'est aussi la dépossession de tout contrôle sur l'organisation de son travail, du fait de la parcellisation des tâches. [...]
 

La dictature des actionnaires

          Pour ATTAC, mais aussi pour le SNES, l’OCCE (Office central de la coopération à l’école), etc., le marché mène à la bourse, la bourse c’est la spéculation et la spéculation c’est mal. Il faut donc interdire certains enseignements, et tant pis pour la liberté pédagogique.

          C’est pour protéger les élèves de la compréhension et des tentations de la bourse qu’un professeur membre d’ATTAC du lycée Blanqui de Saint Ouen (93) s’en est pris à un de ses collègues qui organisait un jeu de simulation boursière avec ses élèves, avec à la clé des prix attribués par le CIC. Il s’agit là d’une activité pédagogique appréciée des élèves et visant à faire comprendre la loi de l’offre et de la demande ainsi que le fonctionnement des marchés financiers et le financement désintermédié. Mais pour ATTAC, « ce jeu fait l’apologie de la spéculation boursière en occultant les désastres sociaux et environnementaux qu’elle entraîne ». Il serait aussi un « jeu à caractère publicitaire, commercial et idéologique ».

          Le réseau altermondialiste s’est là encore mobilisé pour que plus jamais un enseignant ne reproduise cette action idéologique. Il fallait pour cela faire condamner l’établissement et aller jusqu’à la création d’une jurisprudence. Soutenu dans sa démarche par ATTAC, l’APED, la CSF (Confédération fédérale des familles), la Ligue de l’enseignement, l’OCCE, le RECIT (Réseau des écoles de citoyens), le SNES, l’UFAL (Union des familles laïques), l’enseignant procédurier obtient le 1er juillet 2004 devant le tribunal administratif de Cergy Pontoise l’interdiction du jeu dans le lycée. ATTAC a parlé d’une victoire sur la marchandisation de l’école, alors que le plaideur a poursuivi de sa vindicte les enseignants ayant participé à ce jeu en mettant en cause les heures supplémentaires qui leur ont été attribuées dans le cadre de ces activités!

          Plus généralement, des professeurs qui osent s’affirmer libéraux font aussi l’objet d’attaques sournoises. Des collègues partageant la conception de l’objectivité d’ATTAC n’hésitent pas à se demander comment des enseignants de l’Éducation nationale peuvent donner des cours glorifiant le marché et donc le darwinisme social (le manuel Bréal Terminale – page 492 – place d’ailleurs Malthus dans le camp libéral!). L’ostracisation et les démarches hostiles arrivent ensuite. Le journaliste Éric Brunet dans Être de droite, un tabou français dédie d’ailleurs une partie de son ouvrage à l’Éducation nationale et raconte le harcèlement moral auquel font face des enseignants atypiques.
 

Orienter par une vision unilatérale obligatoire

          Pour du matériel pédagogique en économie, ATTAC IDF Éducation renvoie au site Des sous… et des hommes. On y propose des livres commentés brièvement, parmi lesquels on trouvera matière à faire ses cours:
 

Petit bréviaire des idées reçues en économie par les Éconoclastes: « "Les charges sociales sont l'ennemi de l'emploi!"; "La mondialisation est un phénomène inéluctable et sans précédent!"; "La Bourse, on ne peut pas s'en passer!!!!"… Vous reconnaissez ces antiennes! Alors dévorez ce livre si vous voulez les remettre en perspective de façon argumentée! » … « C'est synthétique et réjouissant intellectuellement! »

Antimanuel d'économie par Bernard Maris aux Éditions Bréal, ordinairement spécialisées dans les manuels: « Se lit comme un roman!! Rigolo, avec de superbes illustrations. Et en plus, ce livre sent bon!!! »

La démence sénile du capital, fragments d'économie critique de Jean-Marie Harribey (enseignant et co-président d’ATTAC) aux Éditions du Passant: « Du bonheur en barre!!! Ce livre est un recueil des chroniques que cet économiste tient dans la revue "Le passant ordinaire": des textes courts donc, sur lesquels on peut revenir plusieurs fois. »

          On apprendra aussi sur ce site prisé des alter-enseignants qu’il existe des livres dangereux comme L'économie expliquée à ma fille et La mondialisation expliquée à ma fille d'André Fourçans: « Pour comprendre le système de pensée des néo-libéraux (ça peut toujours servir...). » « Comment dire??? Réjouissant! Dangereux si certains lecteurs désireux de comprendre sincèrement l'économie pensent que cet ouvrage présente la seule vision possible de l'économie... »

          On comprendra donc que certains ouvrages ne doivent être exploités que pour être combattus. Faute de les brûler, un enseignant ne devrait donc présenter un auteur jugé libéral par ses alter-collègues que pour le descendre en flèche aux yeux de ses élèves.

          Le même ouvrage sera d’ailleurs présenté de façon très négative et moqueuse par Alternatives Économiques, on ne s’en étonnera pas. En effet, le magazine est très souvent le manuel bis, voire le manuel des cours de sciences économiques et sociales. Sa présentation agréable et accessible, sa présence dans tous les CDI et dans tous les casiers des enseignants de SÉS avec offres d’abonnement promotionnels, cahiers pédagogiques et hors séries pour l’enseignant qui y abonne ses élèves, lui donne la faveur non seulement des enseignants très à gauche, mais aussi de ceux qui ont besoin d’une aide pour réaliser des cours conformes aux thèmes du référentiel.

          De plus cette revue plaît beaucoup à nombre d’inspecteurs en économie puisque les sujets de bac ES, STG, mais aussi des BTS tertiaires accordent une presque totale hégémonie aux textes issus d’Alternatives Économiques. C’est inquiétant quand on sait que l’on trouve dans cette publication des positions antilibérales caricaturales et des professions de foi ouvertement anticapitalistes et antimondialistes. D’ailleurs la revue en tant que personne morale est membre fondatrice d’ATTAC avec Le Monde Diplomatique (source très souvent utilisée en cours également).

          Mais priver les élèves de références « libérales », les abreuver d’une vision unilatérale de l’économie et de la société n’est pas suffisant pour les conscientiser. Il faut aussi que l’économie les concerne en tant qu’acteurs afin de peser sur des choix de société. Là aussi la conscientisation ne se fait que dans un sens. On a davantage affaire à une expérience pavlovienne qu’à de l’éducation.

          Il est évidemment nécessaire de revoir le contenu des manuels, mais ce n’est là qu’un tout petit pas. Rien ne changera vraiment tant que le recrutement aux concours favorisera des enseignants présentant un certain profil (le terrorisme intellectuel dont a été victime le jury Salin en témoigne), tant que les Instituts universitaires de formation des maîtres formateront ce profil et tant que certaines officines feront de l’enseignement leur chasse gardée.