15 septembre 2013 • No 314 | Archives | Faites une recherche | Newsletter

 

 

   
OPINION
La capitalisation au secours de la répartition
par Michel de Poncins


Des faits nouveaux sont intervenus sur le front des retraites. La grande parlotte nationale annoncée par le gouvernement est bien en route. Des promesses sont formulées. Tous les moyens seront mis sur la table pour sauver la répartition; celle-ci est considérée comme le nec plus ultra dans le domaine des retraites car elle est supposée reposer sur un contrat entre les générations. S'ajoute la chimère de l'égalité.

Constatons que ce magma idéologique fut partagé par d'anciens gouvernements ainsi que l'habitude des parlottes ne débouchant sur rien de vraiment nouveau sinon des rapiéçages.

L'existence d'un prétendu contrat est un gros mensonge. Un contrat implique une signature après négociation. Rien de tel ici. Il y eût, au sortir de la guerre, une action de force étatique obligeant les salariés à verser des cotisations dans des caisses spéciales, contre la promesse de toucher un jour une pension; par la suite, le système fut étendu à d'autres catégories que les salariés.

L'exécution de la promesse elle-même dépend du bon vouloir changeant des gouvernements qui sont, pour leur part, soumis aux élections. S'ajoute la floraison des régimes spéciaux dont le nombre et la complication sont difficiles à cerner. 

Vers un replâtrage

La répartition, contrairement à la capitalisation, est tributaire de la démographie. De ce fait, le pouvoir n'a aucun mal à sonner la trompette d'alarme pour un avenir relativement proche et chacun y va de ses statistiques plus ou moins pessimistes.

Le pouvoir, alors, pianote sur tous les paramètres comme les précédents gouvernements l'ont fait: durée de cotisation, impôts, âge de départ, charges des entreprises, contribution sociale généralisée, etc. Chaque note de la gamme suscite des hurlements. Les partenaires sociaux savent bien, toutefois, que le système est à bout de souffle et qu'il faudra passer à la casserole. Le seul espoir est, après la parlotte, de passer la patate chaude à d'autres. 

Dans ce paysage, il est une nouveauté, c'est la pénibilité que le pouvoir veut prendre en compte. Il dénombre dix causes de pénibilité et songe même à l'ouverture pour chacun d'un compte de pénibilité. Nous voici avec la promesse de beaux contentieux car personne ne pourra fixer juridiquement les degrés de pénibilité réels.
 

   

« La répartition, contrairement à la capitalisation, est tributaire de la démographie. De ce fait, le pouvoir n'a aucun mal à sonner la trompette d'alarme pour un avenir relativement proche et chacun y va de ses statistiques plus ou moins pessimistes. »

   


Au secours: la capitalisation

Un fait nouveau est récemment intervenu. Un journaliste des médias officiels a osé poser à un syndicaliste, Jean-Claude Mailly, la question dangereuse: la capitalisation ne pourrait-elle pas être envisagée au moins à titre partiel? Le syndicaliste l'a balayé en disant: trop tard. 

Ce trop tard n'est pas vrai. La répartition détruit la richesse au fur et à mesure qu'elle se crée puisque l'argent est distribué aussitôt que récolté. La capitalisation crée la richesse par les investissements auxquels se livrent les gestionnaires, soit directement, soit par des fonds de pension. Il est évidemment nécessaire que les épargnes contractuelles bénéficient du même statut fiscal et social que les cotisations dans la répartition.

En refusant la capitalisation, nous arrivons à une situation aberrante: les grandes entreprises du CAC 40 sont soumises au bon vouloir des fonds de pension de Californie ou d'ailleurs.

Des expériences de passage à la capitalisation ont été menées dans plusieurs pays. Celle du Chili est intéressante. Le passage reposait sur le volontariat et fut largement suivi. L'influence bénéfique sur le PIB fut telle que l'on put sans dommage payer les pensions de ceux qui étaient restés dans le système ancien.

Un Aggiornamento nécessaire

Les syndicats détestent la capitalisation et adorent la répartition. Cela se comprend car le dernier système leur donne perpétuellement du grain à moudre. Avec la capitalisation, ils pourraient certes intervenir mais dans un esprit constructif, ce qui n'est guère leur habitude. Le pouvoir actuel, ficelé par les syndicats, va donc probablement passer à côté de sa chance.

Reste l'opposition. Elle pourrait reconnaître son erreur du passé et annoncer la capitalisation en cas de retour aux affaires. Ce serait l'Aggiornamento. Avec une communication adaptée, ce pourrait être un argument électoral massif.

Y-a-il une opposition ou des fantômes? La question est posée.
 

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Michel de Poncins écrit les flashes du Tocqueville Magazine et est l'auteur de quelques livres.

   
 

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