Montréal,  25 sept. – 8 oct. 1999
Numéro 46
 
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     LE QUÉBÉCOIS LIBRE publiera toutes les lettres pertinentes. N'oubliez pas d'écrire vos nom et lieu de résidence. We also accept letters in English. 
 
 
 
 
 
 
 
 
COURRIER DES LECTEURS
  
LES DOMMAGES DU
PATERNALISME ÉTATIQUE
 
 
          Selon la philosophie libertarienne, comme le gouvernement est paternaliste envers les citoyens ou en d'autres mots sait mieux qu'eux ce qui est bon pour les gens, il faut donc défendre la liberté. Il y a une classe des citoyens pour qui la défense de cette liberté s'avère difficile: les citoyens atteints dans leur santé mentale. Sans doute pour épargner de l'argent, on a voulu depuis quelques années que le malade participe aux soins de santé. La situation qui en résulte est dramatique.  

          Dans Chaudière-Appalaches, par exemple, après une intervention illégale et musclée de la part de la régie régionale de la santé dans un organisme supposément autonome qu'elle subventionne, il y a eu deux suicides, dont le secrétaire de la corporation nouvellement nommé. La vice-présidente mise à la porte par la régie a fait un séjour de trois semaines à l'hôpital avec des électro-chocs. Des morts, des blessés et énormément de peurs, c'est le prix de la liberté. 

          La guerre n'est pas gagnée pour autant, comme à la guerre ce sont les gagnants qui écrivent l'histoire. En effet, je fais une plainte officielle mais c'est à cette régie que le système impose de se plaindre. Bien entendu, ils ne me rencontrent pas. Je porte ma plainte plus loin c'est-à-dire au commissaire aux plaintes. Pour me rendre compte que je suis atteint d'une naïveté crasse qui me fait pencher du côté de la confiance en l'humanité. Même après trois suicides en tout à cet endroit, le commissaire trouve la vie belle et je n'ai pas raison, selon lui, de me plaindre. Présentement, je fais évaluer le tout par un avocat. Même pour lui, il me dit que c'est compliqué et j'espère qu'il ne me fera pas une dépression.  

          J'ai parlé à une journaliste, écrit aux membres du c.a. de la régie, rencontré la députée, écrit à la ministre et quoi d'autre? L'épaisseur des préjugés et du paternalisme empêchent tous ces gens-là d'appliquer, sinon la loi, du moins leur bon sens. 

          Lâchez pas vous autres, je vous envoie d'autres nouvelles du front aussitôt que j'en ai. 

Denis Mercier
St-Nicolas
  
 

 
 
 
QUE FAIRE CONTRE
LES FASCISTES DE LA SANTÉ?
 
 
          La nouvelle loi antitabagiste entrera en vigueur le 17 décembre prochain. Elle s'appliquera aussi dans les édifices commerciaux. Notre petite entreprise loue deux bureaux dans un centre d'affaires, bail de deux ans renouvelable. La location de nos bureaux, nous la payons grâce à nos capacités d'innovation et de créativité dans notre domaine et notre métier, grâce à nos efforts pour contribuer à la création de la richesse. L'édifice de 10 étages et les bureaux sont privés.  
  
          Mais, il y a la santé publique! Le gérant de l'immeuble est bien embêté. Il doit rencontrer tous les locataires, consulter un avocat spécialisé en environnement, enfin faire des démarches pour voir jusqu'où notre liberté individuelle et de contribuable peut être protégée. Apparemment, la loi est applicable à moins de disposer d'un système d'aération pour chaque bureau fermé. Là, les Soviets seraient plus coulants, peut-être, et nous serions à l'abri d'éventuels délateurs.  
  
          L'argument massue, c'est la santé publique. Les hôpitaux sont remplis de victimes du tabac et ceux qui respirent notre fumée sont aussi des victimes potentielles. Les maladies causées par le tabac coûtent cher aux payeurs de taxes, à la collectivité sacro-sainte. Ce sont des arguments que je prévois de la part des locataires, non-fumeurs et avocats en majorité.  
  
          J'ai eu beau lire tous les textes de Pierre Lemieux sur le sujet, dont LES FASCISTES DE LA SANTÉ, je n'arrive pas à disposer d'arguments solides. En fait, la clé du discours fasciste, c'est que nous, les amoureux du tabac, nous nuisons à la santé des autres. En disposant comme nous l'entendons de notre liberté, nous empiétons sur celle des autres qui ne fument pas.  
  
          Ceci n'est pas une colle pour QL. Lors du meeting avec les locataires de notre étage, je cherche vraiment des arguments solides, rationnels. En avez-vous?  
  
Pierre Brunelle
Longueuil-les-Bains
  
Réponse de Martin Masse:   
  
  
Bonjour Monsieur Brunelle,  

          Je ne sais pas si je peux vous aider. Dans ce débat comme dans bien d'autres, il y a de bons 
arguments à long terme pour soutenir qu'une société plus libre permettrait une coordination 
optimale des actions de chaque membre de la société (c'est-à-dire, respectant le mieux les choix 
différents et contradictoires de chacun), mais les arguments à court terme pour contourner des 
lois autoritaires sont plus difficiles à élaborer.  

          À long terme, les problèmes de santé et de cohabitation peuvent se régler d'eux-mêmes. Si le 
système de santé était privatisé, les fumeurs paieraient évidemment des montants d'assurance plus 
élevés, pour compenser les risques pour la santé inhérents au tabagisme. Comme pour beaucoup 
d'autres choix que nous faisons (être plus prudent en conduisant, etc.) nous subirions alors les 
conséquences de nos comportements et les autres n'auraient pas à payer pour les choix plus 
risqués que nous faisons. Dans la situation actuelle, les étatistes antitabac peuvent toujours 
soulever l'argument que ce sont eux qui doivent payer pour les soins des fumeurs plus malades, 
un argument qui se tient – dans le contexte d'un système de santé étatisé!  

          La question de la cohabitation pourrait se régler de la même façon, en laissant les 
propriétaires, locataires et usagers libres de passer des contrats selon l'évolution du marché. Il 
pourrait ainsi y avoir des édifices pour fumeurs et d'autres pour non-fumeurs, des restaurants 
pour l'un ou l'autre, des compagnies où vous devez accepter de subir la fumée ou de ne jamais 
fumer si vous êtes engagés, etc. Dans les cas où l'exclusion n'est pas possible, il y aurait aussi 
plus d'incitatifs pour trouver des solutions spécifiques comme les systèmes d'aération ou les 
divisions protectrices. Vous faites le choix qui vous convient et si ça ne fait pas votre affaire, vous 
allez ailleurs. Dans une économie flexible, non réglementée et dynamique, tout cela se ferait 
naturellement et harmonieusement, de la même façon que les échanges entre anglophones et 
francophones se feraient harmonieusement (se font, en grande partie, harmonieusement dans le 
secteur privé et les relations interpersonnelles) si le gouvernement n'envenimait pas 
constamment la situation sur le plan politique.  

          Évidemment, ce scénario semble compliqué pour ceux qui veulent des solutions simples et 
applicables à tous, comme « on bannit la cigarette partout » ou « on abolit l'anglais partout ». Mais 
le but d'une société libre est justement d'accomoder le mieux possible les choix différents et 
contradictoires des individus, de garantir un contexte social pluraliste sans brimer qui que ce 
soit. La solution uniforme et autoritaire, elle, brime toujours tous ceux qui sont exclus du 
soi-disant « consensus » 

          Il faut aussi faire la différence entre défendre sa préférence particulière – dans ce cas-ci, 
fumer – et défendre une solution libertarienne. Personnellement, je ne fume pas et je déteste la 
cigarette. Comme beaucoup de gens, je fais aussi de l'asthme et je supporte mal la fumée. Ça ne 
m'empêche pas de défendre farouchement la liberté des fumeurs et des solutions qui permettraient 
aux fumeurs comme aux non-fumeurs de faire ce qu'ils veulent avec leur corps, de vivre 
confortablement selon leurs choix et de se respecter. Les meilleurs arguments ne sont pas ceux 
qui défendent les choix particuliers mais plutôt ceux qui tentent de convaincre que les arrangements 
volontaires qui respectent la liberté de chacun mènent à une société plus juste et plus harmonieuse. 
Par contre, les solutions coercitives et uniformes briment la liberté, engendrent l'intolérance et la 
suspicion, et mènent inévitablement à des excès comme la loi que vous évoquez, qui stipule que des 
délateurs pourront maintenant être nommés pour dénoncer les fumeurs délinquants dans les 
entreprises. On n'est pas loin du totalitarisme soviétique!  

          La solution libertarienne en est une qui fait confiance aux individus. La politesse, la civilité, 
le respect des autres, sont des qualités qu'on développe lorsqu'on est libre et responsable, et donc 
lorsque nos actions ont des conséquences sur les autres dont il faut tenir compte. Les étatistes, eux, 
croient qu'il faut absolument imposer des règles uniformes, avec menaces de sanctions, pour 
obtenir des résultats. On voit où cela mène: dans les ex-pays communistes, la courtoisie et le 
savoir-vivre ont foutu le camp il y a longtemps avec la liberté. Peut-être vos voisins d'étage 
seront-ils plus ouverts à une solution ad hoc pour accommoder votre choix si vous leur faites valoir 
qu'il s'agit d'un débat plus large sur le type de société que nous voulons. Ce n'est pas évident, je le 
sais, ces arguments sont plus abstraits et s'adressent à la conscience morale, mais de toute façon, 
vos options sont limitées. Le bras coercitif de l'État est maintenant au service des intolérants et s'ils 
veulent s'en tenir à leurs intérêts immédiats, vos voisins non fumeurs pourront s'appuyer sur la loi 
sans difficulté. Pour renverser cette situation, il faudra donc changer les mentalités à long terme.  

          Bonne chance,  

M. M. 
  
 


 
  
LES LIBERTARIENS, DES SOUMIS
  
  
          PRIX BÉQUILLE DE PLATINE: À tous les individus qui appuient financièrement les chars d'assaut de la pensée libertarienne d'illettrés économiques; ces libertariens qui sont des supposés ennemis de l'État. 

          Je me tiens les côtes. 

          Ce cher État, chers libertariens, que vous défendez sans même le savoir car il est garant des droits et privilèges de vos maîtres – élites naturelles? haha – discipline du marché, esclavage salarial, etc. Allez allez, continuez à vous soumettre et à penser le contraire. 
  
          C'est vrai, beaucoup à gauche sont comme vous. Et beaucoup comme vous sont des cons. Vous récupérez et déformez les pensées ou les écrits de Smith, Orwell, etc. Vous vous défendez de vous défendre sans arrêt alors la paranoïa s'empare de vous. Vous mettez des clôtures autour de votre personne, autour de votre cerveau, le gouvernement va vous manger. Rrrrr. Allez, installez des clôtures pour que vous puissiez vous défendre, et demandez que chaque individu puisse porter une bombe atomique: si le gouvernement en porte, nous aussi nous pouvons en porter. 
  
          C'est pathétique. Dans votre dernier QL, vous décernez vos prix béquille à des organismes qui, oui, demandent des subventions de l'État, mais ces montants accordés restent des peanuts si on les compare aux subventions accordées aux entreprises. Et les centaines de millions reçus par Pratt & Whitney pour couper des jobs? Ça ne vaut pas un prix béquille? Vous êtes des soumis, j'vous dis. Bientôt sortira une étude sur les subventions accordées directement ou indirectement aux multinationales pétrolières au Canada dans la dernière décennie: 60 milliards de dollars. J'anticipe déjà votre silence à émanation toxique. Et çe n'est que pour l'industrie pétrolière. 
  
          Et la spéculation du marché, elle? qui tue l'économie réelle? Les bulles financières créent de la richesse, je suppose. À crédit, là, certainement. 

Bien à vous, malgré tout, 

 

                                                                                 Pierre Cropotkine
St-Pie de Bagot
  
Réponse de Martin Masse:   
  
Cher Monsieur Cropotkine (seriez-vous par hasard un illustre descendant du célèbre prince russe 
et penseur anarchiste? Ou bien avez-vous simplement peur de dévoiler votre vrai nom?), 
   
          Mettez votre masque à gaz, ma réponse risque d'être plus toxique que le silence que vous 
anticipiez. Comme bien des gens qui partagent votre point de vue supposément critique, vous parlez 
à travers votre chapeau. Si vous aviez fait un minimum de recherche, vous auriez constaté que nous 
avons régulièrement accordé des Prix Béquille aux entreprises – et notamment TROIS FOIS à 
Pratt & Whitney – qui reçoivent des subventions. Quelques-unes sont listées ci-dessous.  
  
          S'il y a un thème qui revient régulièrement dans les Prix Béquille, les nouvelles brèves et mes 
éditoriaux, c'est bien que les subventions sont une intervention étatique tout à fait néfaste. Je peux 
répéter les principaux arguments pour votre édification: elles créent une dépendance des gens 
d'affaires envers l'État et ne sont qu'un substitut à court terme aux restructurations nécessaires 
des entreprises; elles créent une compétition déloyale entre ceux qui réussissent à en obtenir et 
leurs concurrents qui n'en reçoivent pas; elles créent des distorsions dans le marché en allouant 
des fonds sur des critères bureaucratiques et politiques plutôt que strictement financiers; elles 
permettent aux politiciens de s'ingérer indûment dans des décisions administratives privées; en 
siphonnant des ressources dans un secteur de l'économie pour les redistribuer dans un autre, elles 
tuent autant d'emplois qu'elles permettent d'en créer artificiellement; elles entretiennent 
l'existence de bureaucraties inefficaces et inutiles; etc. etc. etc. C'est vous qui êtes pathétique mon 
cher Cropotkine (au fait, votre ancêtre écrivait son nom avec un K, pas un C), et qui soumettez votre 
esprit aux clichés gauchistes les plus éculés sans réfléchir deux minutes. 
  
          Pour ce qui est de la spéculation et des bulles financières, il s'agit d'un des domaines de la 
théorie économique auquel les théoriciens de l'École autrichienne (notamment, Mises et Hayek), ont 
accordé le plus d'attention. En gros, ils expliquent que depuis la création par les États au début du 
siècle de banques centrales, la nationalisation de la monnaie et le découplage entre la valeur de la 
monnaie et une unité concrète (par exemple, l'or), les banques centrales ont tendance à créer plus de 
crédit et de monnaie qu'il n'est nécessaire et approprié pour l'économie, selon le modèle keynésien 
qui veut que plus il y a d'argent en circulation, plus « l'effet d'entraînement » sur la croissance 
économique sera important. En réalité, plus de papier monnaie en circulation ne mène pas à la création 
de plus de richesse, mais simplement à plus d'inflation. La spéculation excessive, les bulles financières 
et les crises économiques qui s'ensuivent sont des conséquences de ce gonflement artificiel de la masse 
monétaire par des banques centrales étatisées, elles ne sont absolument pas une caractéristique 
inhérente au système de marché, comme vous prétendez et comme plusieurs illettrés économiques 
continuent de le croire. Je vous invite à ce sujet à lire les deux excellents articles de mon collègue 
Pierre Desrochers sur la crise des années 1930, le QL, nos 22 et 23, ainsi que le mien UN NEW DEAL 
À L'ÉCHELLE PLANÉTAIRE, no 22. 
  
          Bonne lecture et au plaisir,  
  
M. M.   
  
  
Béquille de bronze no 40: à Pratt & Whitney. 
Béquille d'or no 32: à la Banque Nationale. 
Béquille de bronze no 25: aux dizaines de compagnies téteuses de subventions (46) 
qui profitent des montants redistribués par la ministre au grand coeur Louise Harel 
à partir du Fonds national de formation de la main-d'oeuvre. 
Béquille d'argent no 20: à Cognicase. 
Béquille de bronze no 20: à Pratt & Whitney. 
Béquille de bronze no 12: à Lactel. 
Béquille de bronze no 11: à Sucre Lantic. 
Béquille de bronze no 7: aux grandes compagnies québécoises de l'aéronautique, 
dont Pratt & Whitney. 
Béquille de bronze no 6: à la compagnie Iris de Montréal. 
(...) 
 
 
 
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