Montréal, 15 octobre 2005 • No 159

 

COURRIER DES LECTEURS / READERS' CORNER

 

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WAL-MART ET LES FAUSSETÉS
VÉHICULÉES DANS NOS MÉDIAS

 
 

Bonjour,

          Je trouve toujours intéressant et instructif de lire Mathieu Bréard. Je me demande quel espoir il reste aux citoyens moyens d'être mieux informés. Ces leaders ne sont pas fous, mais d'une malhonnêteté intellectuelle navrante. Quels recours pourraient intenter les citoyens conscients d'une telle manipulation des esprits inacceptable en démocratie. Les tribunes québécoises populaires (journaux, télévision) sont en grande partie accaparées par les tenants du discours anti-américain. Quelle désolation que cette absence d'esprit critique de la part de nos concitoyens, entretenue par une classe politique hypocrite qui n'a que faire du bien commun. De plus en plus de voix s'élèvent pour réfuter les faussetés véhiculées dans nos médias. Mais elles demeurent hors d'atteintes du citoyen, trop confortable qu'il semble être dans le rôle réducteur qui lui est réservé.

Hélène Beaulieu
 

 

AVORTEMENT: IL N'EXISTE PAS D'AUTRES SOLUTIONS!

 
 

          Sur l'avortement, j'aimerais pouvoir me projeter dans l'avenir... Lorsque la science nous donnera les moyens de prendre un embryon/foetus et de le transplanter dans le corps d'une autre femme, l'on dira à propos du passé (en termes simplistes): « Avant, lorsqu'une grossesse n'était pas désirée, certaines allaient jusqu'à tuer l'embryon car il n'existait pas d'autres solutions! Les autres (celles qui décidaient de le garder), devaient en subir les conséquences le reste de leur vie ».

          Je dis cela car ce n'est pas la première fois que la science, en nous offrant plus de choix, permet aux gens de poser des gestes qui reflètent encore plus leur volonté. Devant un accouchement difficile, par le passé, on « décidait » de sacrifier la mère plutôt que l'enfant à naître. Cela devait aussi être un sujet controversé. Maintenant, nous exécutons une césarienne et la question ne se pose plus (en tout cas, je ne l'entends plus… il y a peut-être des religions qui défendent la césarienne?).

          Devant une grossesse non désirée, nous n'avons que deux choix: avorter ou mener à terme. On a beau trouver tous les arguments pour ou contre l'avortement, tant que nous n'avons pas d'autres choix, la question demeure controversée car les deux options sont lourdes de conséquences. Je prétends que l'avancement de la science mettra un terme à cette question. Peu importe ce que vous pensez du foetus, vous aurez l'option de le donner en adoption à une mère qui désire un enfant.

Raphaël Chassé
www.raphzone.com
 

 

L'ENTREPRISE PRIVÉE ET LES MONOPOLES

 
 

          Permettez-moi de répondre aux réponses (!) de MM. Dorais et Bréard concernant le commentaire de M. Carpentier. Vous omettez toujours de mentionner que dans une économie sans contrôle de l'État, rien n'empêchera des entreprises privées d'obtenir des monopoles dans certains marchés. Pas besoin d'aller bien loin, le transport en commun à Montréal au début du siècle. Ou dans la même période, des entreprises privées qui étaient seules à fournir l'énergie pour toute une localité. Résultats? Des prix astronomiques, évidemment. Et aujourd'hui, qui peut sérieusement dire que certains marchés, comme par exemple l'automobile, n'est pas plus ou moins monopolistique (oligopolistique)?

          Dans un monde sans État, rien ne pourrait empêcher une compagnie comme Monsanto d'acheter TOUTES les terres cultivables d'un pays... Rien ne pourrait empêcher Wal-Mart d'acheter un village... Allo la concurrence, bye-bye le rêve de « liberté libertarienne » et rebonjour le féodalisme...

Dominic Claveau
Montréal

Réponse de Mathieu Bréard

Bonjour M. Claveau.

          La croyance qui veut que la libre concurrence mène à des monopoles est fausse. Dans l'histoire, les seuls véritables monopoles ayant existé sont ceux qui étaient protégés par l'État.

          Dans un marché libre, la rentabilité et la survie de tout projet dépendent de la satisfaction des consommateurs. Ils sont les seuls juges de la qualité d'un produit ou d'un service. Une entreprise qui s'impose dans un domaine sur une certaine période peut très bien affronter un marché très compétitif quelques années plus tard. Prenons simplement l'exemple de Microsoft que l'on accuse, à tort, d'être en situation de monopole. Cette société ne cesse d'être menacée par IBM sur le terrain des systèmes, par Novel sur celui des réseaux. De plus, ces dernières années l'arrivée d’Unix et de FireFox lui vole d'importes parts de marché. La libre concurrence oblige continuellement les entrepreneurs à se recycler sous peine de se faire doubler. D'ailleurs, il y aura toujours quelque part des individus pour mettre au monde de nouvelles idées, de nouvelles techniques de management ou de marketing, afin de commercialiser de nouveaux produits. Rien n'est éternel, mais tout est en mouvement.

          Par contre, pouvez-vous en dire autant d'une Société complètement monopolisée par l'État?

          Au Québec actuellement:

  • Est-il possible d'utiliser un autre moyen de transport en commun que celui de la STM? Non, monopole d'État;

  • Est-il possible de signer un contrat avec un autre fournisseur d'électricité qu’Hydro Québec? Non, monopole d'État;

  • Est-il possible d'acheter des vins et spiritueux ailleurs qu'à la SAQ? Non, monopole d'État;

  • Est-il possible de se faire opérer dans une clinique privée? Non, monopole d'État.

          Tous ces monopoles sont protégés par la loi et donc intouchables. En d'autres mots, si je ne suis pas satisfait du service offert, je n'ai d'autre choix que de fermer ma gueule et devenir un bon contribuable docile. D'autant plus que ces monopoles n'ont aucune obligation de m'offrir un service de bonne qualité. Évidemment, puisque n’étant confrontés à aucune concurrence, ils savent qu'ils sont éternels et peuvent se permettre de multiplier les erreurs, et en faire payer la note à la population.

          Admettons que j'ai une idée nouvelle, un concept innovateur pour concurrencer la Société des alcools du Québec, puis-je la développer sous ma propre bannière? Non cela est impossible, car l'État contrôle complètement le marché. Lors de la dernière grève des employés de cette société, l'ensemble des consommateurs du Québec ont été littéralement pris en otage, n'ayant aucune autre source d'approvisionnement.

          Bref, dans une société contrôlée par l'État, c’est bye-bye la concurrence et bonjour la république communiste.

Bien à vous,

Mathieu Bréard

Réponse d'André Dorais

Monsieur,

          Un monopole ne peut exister pour une période prolongée que s'il possède la protection de l'État. Cette protection peut être sous forme de lois, de subventions ou les deux. Vous citez en exemple le transport en commun au début du siècle dernier, mais justement la Compagnie des tramways de Montréal était subventionnée et protégée par les différents paliers de gouvernement. Vous affirmez que les entreprises énergétiques chargeraient des « prix astronomiques » aux consommateurs, mais cela est sans fondement. Quant à vos derniers commentaires, ils relatent la peur de voir s'étendre le pouvoir des entreprises, mais encore une fois ce pouvoir n'est rien s'il n'est pas appuyé de la force coercitive de l'État. Une entreprise qui voudrait acheter un « village » devra négocier avec ses propriétaires. Un État ne négocie pas, il prend par la force au nom d'une certaine idée du bien. « Monsieur l'État, utilisez votre force coercitive afin de donner une leçon au gros Wal-Mart qui vend des produits que les gens désirent à bon prix, car c'est injuste. » Bonjour l'éthique!

André Dorais
 

 

LES SERVICES PUBLICS FONT PARTIE DU BIEN PUBLIC

 
 

          Chers libertariens, vous êtes sans doute les enfants des anarchistes que nous fûmes. Et ce disant, je respecte votre envie d'une totale liberté, votre rejet de l'État, de la corruption, votre vision d'une harmonie réalisée par le libre jeu de l'économie (merci Charles Fourrier)... Malheureusement votre grandeur morale n'a d'égale que la rapacité des barons du profit à court terme et ces derniers nous éloignent de plus en plus de l'harmonie rêvée (mais ils vous encouragent).

          Avez-vous réfléchi aux nombreuses chutes d'avions de cet été? J'en vois tous les jours l'origine dans la course au « prix plancher » à laquelle les sites de voyages se livrent (je travaille sur le Web). Il a fallu en dénicher des avions qui dorment dans des hangars, des avions en dessous des normes, pour satisfaire des voyagistes qui vendent n'importe quoi.

          Eh oui, le marché a tranché: les avions qui devaient tomber sont bien tombés, tout naturellement, comme les feuilles mortes. Et nous avec.

          Je mesurais mal, plus jeune, combien le libre jeu (que j'appelais) pouvait rapidement devenir la loi du plus fort, la loi de la jungle, la loi du chacun pour soi... autant de non-lois que nous avons classées du côté de l'animalité et pas de l'humanité. Je mesurais mal combien ce laisser faire « naturel » laissait de familles, de cadavres, sur le bord de l'histoire. Des gens dont on ne parle plus parce que, avec notre bien-être, nous marchons sur leurs tombes. Et, je vous l'accorde, Germinal, ce n'est pas gai. La nature naturelle n'est un spectacle idéaliste que pour des rousseauistes attardés. Les paysans savent combien il faut la travailler. Les urbains ont fondé la ville pour se tenir au chaud, loin des loups.

          Libertaire, j'ai compris en 1995 que les services publics étaient de la solidarité organisée, une belle création collective, une barricade contre la barbarie, contre l'intégrisme (je ne crois pas avoir déjà lu ce que je vous dis). J'ai quitté alors ma position idéologique dogmatique du « moins d'État, plus de liberté ». Les services publics font partie du bien public. Ils sont à nous, pour nous, et nous ne le savons plus. Et malheureusement, certains fonctionnaires, s'en servent comme d'un bien personnel.

          Essayez de voir lucidement la part du dogme et la part des faits dans le libertarianisme. Vos enfants ont besoin de l'État laïque, éducatif, soignant, protégeant. Aucune milice, fut-elle la plus partisane de la liberté, ne peut nous garantir ce luxe de sécurité même imparfait. Appliquez le libertarianismeà l'entreprise et vous prônerez l'autogestion. Voilà qui va surprendre vos amis libéraux plutôt patronaux que révolutionnaires.

Cordialement,

David Wynot
Paris
 

 

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